Le ministère des Finances refuse de diffuser la liste détaillée des coupes budgétaires

Le 4 avril, le conseil de gouvernement décidait de couper 15 milliards de crédits d’investissements du budget 2013. Aujourd’hui, deux mois et demi après cette décision, personne hormis quelques initiés, n’est capable de dire quels sont les projets concernés par ces coupes. Mauvaise communication ? Opacité ? Ou bien cela cache-t-il autre chose ?  

Le ministère des Finances refuse de diffuser la liste détaillée des coupes budgétaires

Le 21 juin 2013 à 8h54

Modifié 27 avril 2021 à 22h20

Le 4 avril, le conseil de gouvernement décidait de couper 15 milliards de crédits d’investissements du budget 2013. Aujourd’hui, deux mois et demi après cette décision, personne hormis quelques initiés, n’est capable de dire quels sont les projets concernés par ces coupes. Mauvaise communication ? Opacité ? Ou bien cela cache-t-il autre chose ?  

Depuis le mois de février, le gouvernement, alerté par le ministère des Finances, savait qu’un gros dérapage budgétaire s’annonçait. Les clignotants avaient viré au rouge : 2012 s’avérait être une mauvaise année pour les déficits qui s’étaient aggravés et les dépenses de compensation qui s’étaient envolées.

Le 25 mars, le chef du gouvernement diffusait une circulaire (n°6/2013) demandant aux ministres  d’accorder la priorité aux crédits de report (reportés de 2012 à 2013), comme mesure conservatoire. Le niveau de ces crédits était en effet très élevé : 21 milliards de DH.

Le 4 avril, le conseil de gouvernement supprimait 15 milliards de crédits au titre du budget 2013 (décret n° 2-13-285). Quatre jours plus tard, le ministre des Finances adressait au Trésorier général du Royaume une correspondance (voir fac-similé) lui demandant de ne plus viser aucun engagement de dépense au titre des crédits prévus dans la loi de Finances 2013 jusqu’à réception de la liste détaillée des dépenses supprimées. Cette liste allait figurer dans des décisions conjointes du ministre des Finances et chaque ministre concerné.

Pour rappel, voici la ventilation des coupes budgétaires par secteur d’activité :

Départements ministériels

Montants

Part  (%)

 

 

 

Chef du gouvernement

176 410 288

1,18

Justice 

244 800 776

1,63

Affaires étrangères 

38 351 345

0,26

Intérieur

1 251 825 290

8,35

Communication 

252 749 824

1,69

Enseignement supérieur 

258 170 408

1,72

Education nationale

956 535 895

6,38

Santé

645 531 169

4,31

Economie et Finances

184 625 715

1,23

Economie et Finances-charges communes

2 392 048 100

15,96

Tourisme

159 660 635

1,06

Equipement et Transport

1 751 394 750

11,68

Agriculture et Pêches

2 210 016 417

14,74

Jeunesse et sports

237 673 296

1,59

Habous et Affaires islamiques

634 265 232

4,23

Affaires générales et gouvernance

7 087 409

0,05

Artisanat

131 236 905

0,88

Energie, mines, eau, environnement

1 515 238 727

10,11

Industrie, commerce, technologies

331 265 507

2,21

Culture

107 304 078

0,72

Habitat, urbanisme

278 972 205

1,86

Emploi, formation professionnelle

174 399 463

1,16

Relations avec le Parlement

3 376 997

0,02

Fonction publique

17 944 959

0,12

Défense nationale

600 000 000

4,00

Haut commissariat aux anciens résistants

798 366

0,01

Haut commissariat au plan

34 277 023

0,23

Eaux forêts

70 246 829

0,47

Solidarité, femme, famille

68 218 866

0,46

RME

40 710 958

0,27

Administration pénitentiaire

216 817 568

1,45

TOTAL

14 991 955 000

100,00

 

Conclusion: à la date du 8 avril, tous les investissements prévus dans le cadre de la loi de Finances 2013 sont bloqués.

Depuis ce jour, des journalistes de Médias 24 ont constamment appelé les départements concernés pour connaître la ventilation. Seul le département de Nabil Benabdellah, le ministère de l’Habitat, nous a communiqué sa liste (lire ici). Il avait d’autant plus de mérite à le faire que la majeure partie des coupes qu’il a effectuées portaient sur le logement social. Chapeau bas, camarade!

Au ministère du Tourisme, nous avons reçu une promesse qui n’a jamais été tenue.

Mais le pompon revient au ministère des Finances et à celui du Budget.

- De quelle décision conjointe parlez-vous ?, nous répondent invariablement nos interlocuteurs (tous décideurs).

-De la liste détaillée des coupes budgétaires, par département et par catégorie.

-Ah, je ne l’ai pas. Et je vous demande une petite faveur : si vous arrivez à l’avoir, transmettez-la moi svp. (Celui qui répond ainsi est le plus proche collaborateur de Nizar Baraka).

Il y a quinze jours, nous obtenons copie du courrier adressé par le ministre des Finances au trésorier général du Royaume pour bloquer le visa des engagements (fac-similé). En se basant sur l’inexistence des décisions conjointes et sur ce courrier, l’on ne peut aboutir qu’à une seule conclusion : deux mois (au moment des faits) après la décision du conseil de gouvernement, c’est la totalité des crédits d’investissement de 2013 qui sont bloqués et non plus seulement les 15 milliards de DH.

Mais nous souhaitons vérifier. Et nous reprenons nos coups de fil à tous les étages du ministère des Finances, ainsi qu’aux autres ministères et à la trésorerie générale (TGR). La TGR répond très vite : nous ne sommes pas habilités à vous répondre, c’est une question qui relève des Finances. Du côté du ministère de Nizar Baraka, c’est motus.

 

Nous expliquons à nos interlocuteurs (une bonne centaine de coups de fil ont été passés) que la situation est claire :

- soit toutes les dépenses d’investissement sont bloquées,

-soit les décisions conjointes ont bien été prises, et dans ce cas qu’on les diffuse.

Au final, nous apprenons, par différents biais et recoupements, que les décisions conjointes ont bien été signées par le ministre des Finances et que ce département «ne compte pas les publier».

A partir de là, il y a une seule certitude et quelques hypothèses :

- la certitude : lorsque le gouvernement se réunit en présence du chef du gouvernement et du président de la Chambre des représentants pour discuter d’un projet de loi sur le droit de l’accès à l’information, il n’en pense pas un mot.

- les hypothèses :

1-   le ministre des Finances veut éviter l’avalanche de commentaires négatifs qui se sont abattus sur tout le gouvernement lorsque la décision de couper les 15 milliards a été annoncée ;

2- la liste précédemment rendue publique de la ventilation des 15 milliards coupés par ministère n’a pas été respectée, car il y a eu des arrangements avec certains ministères plus vindicatifs que d’autres.

Des deux hypothèses, quelle est la pire ?

La première montrerait une mauvaise maîtrise de la communication. L’opacité n’a jamais été une solution pour éviter les mauvaises retombées d’image.

La seconde est pire.

Nous préférons accorder le bénéfice du doute au ministère. Au bout de deux mois et demi de sollicitations, nous avons toutefois décidé de prendre l'opinion publique à témoin, en publiant cet article.

Ou alors, expliquez-nous, Monsieur Baraka !

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