Benkirane cherche-t-il à museler les conseillers d’opposition?

Le chef du gouvernement a adressé une correspondance mardi 7 décembre au président de la chambre des conseillers annonçant la suspension de la diffusion audiovisuelle des «droits d’informer » des groupes parlementaires.

Benkirane cherche-t-il à museler les conseillers d’opposition?

Le 8 janvier 2014 à 17h28

Modifié 8 janvier 2014 à 17h28

Le chef du gouvernement a adressé une correspondance mardi 7 décembre au président de la chambre des conseillers annonçant la suspension de la diffusion audiovisuelle des «droits d’informer » des groupes parlementaires.

Cette décision vise-t-elle à museler des voix discordantes des conseillers d’opposition de la 2ème chambre ?

Lors de la séance hebdomadaire de mardi sur les questions orales à la chambre des conseillers, les conseillers se sont affrontés sur la décision de Benkirane d’annuler la transmission télévisée des « droits d’informer » des conseillers. Ces droits permettaient aux présidents de groupes parlementaires de disposer d’un laps de temps de 3 minutes au début de chaque séance pour informer les conseillers sur un événement d’actualité qu’ils jugeaient important et leurs interventions étaient jusqu’alors diffusées en direct à la radio télévision marocaine.

Censure ou décision constitutionnelle?

Benkirane a décidé que l’article 128 du règlement intérieur de la 2e chambre autorisant ces “droits d’informer“ n’avait plus lieu d’être. Il a affirmé se baser sur les décisions (13/924 et 98/2013) du Conseil Constitutionnel qui aurait jugé ces interventions non-conformes à la nouvelle constitution et a donc ordonné à la chaîne Al Oula de cesser la diffusion des séances publiques à partir du 21 janvier.

Prenant prétexte du fait qu’elles se déroulent en même temps que les séances de la chambre des Représentants, le chef du gouvernement a argué que ces dernières ont la prééminence en termes de transmission télévisée.

Lors de la séance de mardi, le ministre chargé des relations avec le parlement est allé au front en soutenant que cette décision ne faisait que suivre les verdicts du Conseil constitutionnel. Habib Choubani a assuré que "la problématique n'a rien à avoir avec le gouvernement, mais plutôt avec l’institution constitutionnelle qui représente la juridiction constitutionnelle". Ainsi "celui qui pense que le gouvernement a violé la Constitution, doit s'adresser à la juridiction constitutionnellement compétente pour juger de la constitutionalité ou non de cette décision".

Réactions de l’opposition

Cette décision qui crée la polémique au sein de la chambre haute vient après plusieurs heurts violents entre les conseillers d’opposition majoritaire et le gouvernement de Benkirane. Les groupes d’opposition ont tous exprimé leur rejet de cette “confiscation du droit des parlementaires au contrôle de l’action gouvernementale et d’un abus de pouvoir de l’exécutif“. Il faut signaler que l’alliance socialiste (PPS), une des composantes de la majorité gouvernementale, s’est joint aux protestations en affirmant son attachement à sauvegarder des droits d'informer dans le cadre de la diffusion TV et radio.

Dans une déclaration à notre rédaction, la présidente du groupe des conseillers de l’USFP, Zoubida Bouayad remet en cause les arguments de Benkirane et interprète cette décision comme une punition en réaction au travail de l’opposition qui ne ménagerait pas le chef du gouvernement.

Pour illustrer son propos, elle évoque le rejet du PLF 2014 par les conseillers d’opposition et la séance houleuse du 31 décembre. La présidente dénonce le fait que les conseillers ne pourront plus informer d’une affaire urgente les citoyens par le biais de la transmission télévisée. La socialiste s’insurge contre l’immixtion de l’exécutif dans le travail du législatif car la télévision appartient à tous les Marocains et Benkirane ne peut se l’approprier impunément pour satisfaire ses desseins politiques

Deux sons de cloche

Le verdict 924/2013 du Conseil Constitutionnel sur lequel s’appuie le chef du gouvernement a été rendu le 22 août dernier et annulait l’article 104 du règlement interne de la Chambre des Représentants permettant aux présidents des groupes de présenter des “droits d’informer“. La Fédération démocratique du travail (FDT) par la voix du conseiller Abdelmalek Afariat tient à préciser que le verdict invoqué par Benkirane ne concerne aucunement la chambre des conseillers mais plutôt celle des Représentants. Il affirme que la mesure prise par le chef de l’exécutif fait étrangement suite à « l’interrogation légitime et critique de son groupe » sur la blague visant les amazighs par le député PJD Abou Zaid El Mokri Idrissi et que cela aurait « dérangé Benkirane ».

Le jeu démocratique menacé ?

En décidant d’arrêter la diffusion de la séquence du droit d’informer, le chef du gouvernement souhaite-t-il faire taire cette tribune en tentant de museler le dernier bastion de l’opposition qui lui tient encore tête?

Si d’aucuns remettent en cause l’utilité de la chambre des conseillers, le jeu démocratique se doit d’élargir le débat car partout ailleurs, l’opposition a le devoir d’exprimer publiquement ses réserves et d’en informer par le truchement des médias les marocains.


 

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