Ce vendredi matin, les roses s’arrachent comme des petits pains au marché des fleurs de la route d’El Jadida, à Casablanca. «La fête de l’amour est une journée spéciale pour nous aussi», sourit un des fleuristes, avant de diriger son regard vers un couple qui s’enquiert des prix. Il faut dire que notre homme aime surtout l’argent. «Ce bouquet coûte cent DH, mais je vous le laisse à quatre-vingt-dix », leur dit-il. La transaction conclue !

L’offre du vendeur prend l’apparence d’un geste commercial, mais il n’en est rien. «D’habitude, on vend un bouquet pareil à cinquante DH », nous explique le vendeur, l’air triomphant. Mais, pour notre jeune couple, il n’y a pas lieu de chipoter sur le prix. L’important, c’est la rose, disait la chanson du regretté Gilbert Bécaud.

Les offres, il y a en à la pelle ici: de dix DH – car on vend aussi des roses à l’unité – à deux cents DH, toutes les bourses y trouvent leur compte. «Bien que les prix doublent pour l’occasion, la demande est très forte», se réjouit un fleuriste.

En cette fête de l’amour, il n’y a pas que les fleuristes qui ont le vent en poupe. C’est le branle-bas de combat aussi chez les chocolatiers et les magasins de lingerie.  Les restaurants et les pubs, qui se livrent bataille des prix depuis une semaine, mettent les petits plats dans les grands pour attirer le maximum de clients. Leurs offres, relayées par les sites de deals, sont soumises à une surenchère des prix des plus rudes. Tant que les amoureux trinquent…

Il va sans dire que cette fête, dont l’origine fait polémique, est loin de susciter l’unanimité au sein de la société. «Épatée par cette propension à adopter les fêtes venues d'ailleurs depuis Halloween en passant par la Saint-Valentin (dont les origines remontent aux fêtes romaines païennes des Lupercales). Après la récupération par l’Eglise, une autre sous la houlette du dieu Business», lance Mouna Hachim, chroniqueuse, sur sa page.

Et Stéphanie Gaou, fondatrice de la librairie des Insolites à Tanger, de riposter du tac au tac : «Moi, j'ai cru entendre que les Marocains, jadis, fêtaient toutes les fêtes religieuses avec une vraie convivialité. Est-ce donc devenu si grave qu'ils continuent de le faire?

Sur des pages FB disons radicalement intégristes, les fatwas sont relayées depuis une quinzaine de jours : attention, la Saint Valentin, c’est haram, illicite.

Tantôt critiquée pour son aspect commercial, tantôt par son caractère païen, s’attirant ainsi des fatwas virulentes, la Saint-Valentin n’a rien perdu pourtant de son attrait. Joyeuse Saint-Valentin quand même !