Les jihadistes commencent à quitter la Syrie, le Maroc est concerné

Ce n’est pas forcément une bonne nouvelle. Les jihadistes de la guerre de Syrie quittent ce pays, par centaines. Le problème, c'est qu'ils reviennent parfois dans leurs pays d'origine, munis d'un bagage meurtrier.  

Les jihadistes commencent à quitter la Syrie, le Maroc est concerné

Le 24 février 2014 à 20h01

Modifié le 11 avril 2021 à 2h35

Ce n’est pas forcément une bonne nouvelle. Les jihadistes de la guerre de Syrie quittent ce pays, par centaines. Le problème, c'est qu'ils reviennent parfois dans leurs pays d'origine, munis d'un bagage meurtrier.  

Les discussions de Genève, les progrès de l’armée syrienne officielle sur le terrain, les combats entre les deux factions jihadistes, Jabhat Nosra d’un côté et Daach (ou Etat Islamique de l’Irak et du Levant-Sham); et enfin l’interruption brutale de tout soutien saoudien ont fait que les jihadistes repartent.

Les combats entre les deux factions jihadistes ont été particulièrement meurtriers, on connaît la férocité des deux camps. Plusieurs chefs militaires de renom ont d’ailleurs été tués dans ces opérations.

Ce qui est encore plus tragique, c’est que des jihadistes issus du même pays se sont retrouvés face à face dans ces combats. Des sources crédibles sur les réseaux sociaux et les forums radicaux, signalent de tels combats. Des Tunisiens, des Egyptiens, des Saoudiens, des Marocains, partis soutenir le peuple syrien se sont entretués.

Ces combats entre frères ennemis radicaux islamistes d’un côté et de l’autre, le changement total de position saoudienne ont asséché les sources d’approvisionnement militaire ainsi que les financements, l’argent étant comme on le sait le nerf de la guerre.

Le Roi Abdallah d’Arabie saoudite est allé plus loin en annonçant récemment par décret que les saoudiens partis combattre à l’étranger sont désormais passibles de 5 à 30 ans de prison.

De sorte qu’au final, de nombreux jihadistes, plusieurs centaines selon les articles de presse et les déclarations officielles, voire quelques milliers, rentrent dans leurs pays ou repartent combattre ailleurs. Mais où aller? Le désert libyen n’est plus le sanctuaire qu’il a été.

Des sources crédibles et recoupées signalent donc des retours de jihadistes en Europe (le Royaume Uni en signale officiellement plus de 200), en Arabie Saoudite, au Mali (revenus du sud-libyen où ils s’étaient réfugiés), en Jordanie, en Irak, en Egypte et en Tunisie. Lundi, le ministre tunisien de l'Intérieur a annoncé que 400 jihadistes étaient déjà rentrés au pays du Jasmin.

En quoi le retour de combattants dans leur propre pays peut-il poser problème?

Pour plusieurs raisons:

-l’idéologie qu’ils portent est une idéologie de la violence, de la mort, de la terreur et du takfir. La plupart des jihadistes s’estiment en guerre contre tout ce qui n’est pas musulman, surtout dans ce qu’ils estiment être la terre du seul Islam. En d’autres termes, la population de leurs propres pays peut être visée lorsqu’elle est l’objet d’un takfir (excommuniée).

-leurs capacités opérationnelles sur le plan militaire sont indéniables. Des commentateurs égyptiens et américains prêtent aux jihadistes de retour de Syrie, la forte recrudescence d’attentats en Egypte, avec usage d’armes de guerre sophistiquées et récentes, comme le missile SA-16 qui a abattu un hélicoptère au Sinaï, ou encore l’attentat contre le ministère de l’Intérieur.

Les jihadistes reviennent avec une expérience du combat qui les rend redoutables: ils savent fabriquer des explosifs, entretenir des armes de guerre sophistiquées, planifier un attentat, coordonner… L’expérience montre que les cas de récidive, y compris localement, ne sont pas rares. Mais elle montre aussi que lorsqu’ils sont bien surveillés, et s’ils ne sont pas nombreux, ils savent évaluer le rapport de forces et se font plus ou moins discrets.

Le Maroc en effet est concerné par ces mouvements de retour, même si aucune déclaration officielle, ni de la part des autorités, ni de la part des jihadistes, n’a été relevée. Le Maroc est forcément concerné, à l’instar des autres pays. Jusqu’à présent, les velléités jihadistes au Maroc sont restées extrêmement limitées. Plusieurs de leurs chefs, à leur sortie de prison, disent s’être reconvertis dans l’action politique ou en tous les cas, pacifique. Sur le web, on ne relève pas concernant le Maroc, l’activisme ni le radicalisme militariste, combattant et sanglant que l’on voit sur le web tunisien, libyen ou égyptien.

Combien sont-ils?

L’évaluation la plus plausible est celle du centre américain ICSR (centre international d’étude de la radicalisation).Ce centre estime que 11.000 étrangers ont combattu en Syrie.

Les nationalités les plus représentées sont les Libanais, les Saoudiens, les Tunisiens et les Jordaniens. Les Marocains sont au maximum une centaine, selon les statistiques du centre. Selon nos propres observations, le nombre de jihadistes marocains tués au combat en Syrie est au moins de 20 personnes, mais pourrait atteindre la quarantaine.

Les Marocains ont fait preuve d’un grand engagement, à tel point qu’un ancien détenu de Guantanamo, Brahim Benchekroun (alias Abu Ahmed Al Mouhajir), a créé une brigade (katiba) spéciale pour les combattants originaires du sud-ouest africain, essentiellement composée de Marocains en réalité. Ces observations qui sont les nôtres sont basées sur la lecture régulière des pages jihadistes consacrées aux combats en Syrie, et qui ont l’habitude de donner les noms, les photos et les origines des jihadistes tués.

Les Marocains ont été également parmi les premiers à enrôler des enfants dans la guerre, information révélée par Médias 24 dès le mois de novembre.

Que vont faire les jihadistes marocains de Syrie? Certains tenteront de rejoindre l’Irak où il y a une guerre confessionnelle sunnites-chiites dont les médias parlent peu. D’autres le Sinaï égyptien où Al-Qaida essaie de créer un nouveau front. D’autres les confins libyo-algéro-tunisiens. Certains rentreront au pays. Comme l’avait fait Brahim Benchkroun après Guantanamo et avant de repartir en Syrie.

Présenteront-ils un danger? Le Maroc est un pays stable où les situations sécuritaires sont maîtrisées et qui a fait ses preuves en matière de lutte anti terroriste. On peut donc penser que contrairement à d’autres pays comme la Tunisie, la Libye, l’Arabie Saoudite, la Jordanie et l’Egypte, les jihadistes qui rentreront seront peu nombreux et présenteront davantage un danger potentiel que réel. Vigilance quand même.

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