Le Maroc craignait un attentat, il a eu le drame de Casa

Quel choc, quelle amplitude thermique et politique entre l’alerte du ministre le jeudi 10 juillet  sur le risque terroriste et le terrible drame du vendredi 11 juillet au matin, qui nous met en colère, nous rappelle à l’ordre. Le Maroc nous malmène et nous fait souffrir parfois. Voici pourquoi.

Le Maroc craignait un attentat, il a eu le drame de Casa

Le 13 juillet 2014 à 15h08

Modifié 13 juillet 2014 à 15h08

Quel choc, quelle amplitude thermique et politique entre l’alerte du ministre le jeudi 10 juillet  sur le risque terroriste et le terrible drame du vendredi 11 juillet au matin, qui nous met en colère, nous rappelle à l’ordre. Le Maroc nous malmène et nous fait souffrir parfois. Voici pourquoi.

Les enquêtes de la police, des RG, des services municipaux et du ministère de l’Intérieur montreront  peut-être dans quelques semaines quelles sont les causes réelles de ce massacre gratuit, commis par des Marocains comme vous et moi: 3 immeubles qui s’effondrent en plein cœur de Casablanca au quartier Bourgogne. Bilan à ce dimanche midi: 23 morts (dont un enfant de 10 ans, une femme de 45 ans et un homme plus âgé), 53 blessés et 3 autres immeubles mitoyens évacués!

Une chose est cependant sûre : Ce n’est ni une roquette du Hamas, ni un missile israélien, ni une bombe terroriste qui ont tué ces Marocains et fait des dizaines de blessés  vendredi à Casablanca. Ce n’est pas un jeune de Sidi Moumen, des carrières Thomas ou de Béni Makada qui l’a fait, comme on a pu le craindre vendredi matin après l’intervention jeudi du ministre de l’Intérieur  Mohamed Hassad en conseil de gouvernement.

«Peut-être que ça a sauté à Bourgogne parce qu’un artificier amateur traînait par là». « Peut-être que … ». Non. Et c’est tant mieux d’ailleurs. Mais il y a pire.

Joint sur Skype à Luanda en Angola où il se trouve en mission, l’architecte international et ancien inspecteur de l’urbanisme à Casablanca Abdelhamid Berrada m’explique: «Il y a des citoyens ignorants et/ou de mauvaise foi. Il y a des fonctionnaires corrompus et incompétents. Les extensions se font sans bureaux d’études, ni architectes, juste un tâcheron».

Des propos que le ministre Nabil Benabdellah me confirmera au téléphone quelques heures plus tard. «Lorsque j’étais civiliste à la préfecture de Casa vers 1979-1980, trois immeubles se sont effondrés,» m’indique Abdelhamid Berrada. Décodage: Le problème ne date pas du vendredi 11 mai 2014, nous le savons tous.

A Bourgogne, l’immeuble qui s’est écroulé était à l’origine autorisé en R+1 !

Vendredi avant le drame, il était en train de se métamorphoser en R+5. L’enquête nous en dira plus. Mais les premiers témoignages et les premières analyses de spécialistes sont accablants.

«Si un immeuble s’effondre, me précise l’architecte Berrada, c’est qu’on a touché à la structure porteuse, poteaux ou poutres» avec la question supplémentaire  de savoir comment la chute d’un immeuble a entraîné celle de deux autres bâtiments mitoyens.

Pour Abdelhamid Berrada, il existe trois possibilités:

- «La première est qu’on peut faire des travaux en demandant une autorisation. Sur cette base le propriétaire fait ce qu’il veut. Mais quel est le rôle du moqqadem qui rapporte tout: travaux, visites, voyages et absences dans le quartier?» s’interroge l’architecte familier des chantiers  à Casablanca, Luanda, Dubaï et à Dakar.

Deuxième situation poursuit Berrada, il y a l’autorisation obtenue par corruption;

-«et enfin troisième cas de figure, il n’y a ni autorisation ni rien du tout et le propriétaire –et le fonctionnaire- préfèrent que les travaux se fassent «de la main à la main». «Il ya des cas où le moqqadem, ajoute Berrada, préfère que tu n’aies ni autorisation ni rien du tout pour que certains puissent te racketter». Va-t-il bientôt falloir imprimer des autocollants portant des images de moqataâ avec le slogan «Touche pas à mon pays»?

A ce jour, me confie Berrada, «on me fait visiter des villas à Casa ou des immeubles, et le propriétaire est fier de me dire, «j’ai fait ça tout seul sans architecte». Ce à quoi je réponds: «ça se voit!».

Oui, nous aimerions voir la gestion communale s’améliorer dans toutes les villes du Royaume du Maroc. C’est notre droit, le droit de tous les Marocains.

Morts à Casablanca, à Bourgogne. Pourquoi est-ce que je pense immédiatement à un malheureux terroriste alors que des immeubles qui s’effondrent à Kénitra, Tanger, Fès ou Casablanca, finalement,  est-ce si rare que cela? Niet.

 Parfois, nous sommes conditionnés, sachons-le. Les annonces tonitruantes servent aussi à cela: la veille, M. Hassad, ministre de l’Intérieur, ancien wali de Marrakech et de Tanger dit: «attention au risque de terrorisme » et cela nous mobilise. Et nous formate le cerveau. Vendredi matin, certains ont pensé à un attentat. Ce n’est pas tout à fait faux. Le drame de Bourgogne est un genre d’attentat et ni les bombardements à Gaza ni la coupe du Monde ne peut nous en détourner.

Désormais, nous voulons entendre: «Attention une mauvaise gestion communale peut vous tuer». «Des élus pourris peuvent tuer». «Nous allons agir». On ne rêve pas. On veut. Le pire c’est qu’à Rabat, on le sait depuis un demi-siècle. Le reste n’est que cynisme.  Les ministres  passent mais les problèmes restent. Quand ils n’empirent pas.

Oui, nous aimerions voir la gestion communale s’améliorer de manière dramatique dans toutes les villes du Royaume du Maroc. C’est notre droit, le droit de tous les Marocains. Efficacité et transparence.  A Casablanca, à Rabat, à Tanger, à Ksar Sghir, à Marrakech, à Dakhla et à Laâyoune.

Le ministre de l’Intérieur Mohamed Hassad qui a été plusieurs fois wali sait comment fonctionne une wilaya, une commune, une agence urbaine, un arrondissement. Ses prédécesseurs aussi le savaient. Il y a un mois au parlement, Nabil Benabdellah se plaignait que la corruption et des fonctionnaires corrompus sabotaient la lutte contre les bidonvilles.

On aimerait voir une DCL, Direction des collectivités locales, qui innove et qui se réforme comme nous le recommandent tous les think tanks de la planète et du royaume; des gestions locales auditées et les gestionnaires ripoux sanctionnés.

Le ministère de l’Intérieur est plein de gens compétents.  On aimerait voir le ministère de l’Intérieur au budget richement doté cogiter et  livrer à l’opinion publique, aux citoyens, à la presse,  aux investisseurs et aux politiques, un nouveau projet des collectivités locales fruit des réflexions de nos énarques, de nos juristes, de nos polytechniciens, fruit du meilleur ijtihad intellectuel et politique.

Un projet qui nous livre une configuration qui soit responsabilisante pour les fonctionnaires et les élus, efficace et démocratique pour les Marocaines et les Marocains. Les choses importantes tiennent parfois à peu de choses mais il faut toutefois se décider à commencer un jour.

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