Comment les Douanes mènent bataille contre la sous-facturation

La loi de finances de 2015 a consacré la lutte contre la sous-facturation en douane. Zouhair Chorfi, DG des douanes, explique quels sont les enjeux de cette lutte, les méthodes de redressement, et les opportunités du démantèlement tarifaire.  

Comment les Douanes mènent bataille contre la sous-facturation

Le 3 avril 2015 à 17h14

Modifié 3 avril 2015 à 17h14

La loi de finances de 2015 a consacré la lutte contre la sous-facturation en douane. Zouhair Chorfi, DG des douanes, explique quels sont les enjeux de cette lutte, les méthodes de redressement, et les opportunités du démantèlement tarifaire.  

Pour contrevenir aux textes douaniers, en sous-déclarant la valeur de ses produits, l’importateur peut jouer sur 3 paramètres: la valeur, le poids, l’origine.

L’administration des douanes a mis en place et développe des outils permettant de redresser de façon systématique la valeur juste du produit importé.

Pour repérer la déclaration en sous-volume, le travail de l’inspection est assez évident: les douanes ont mis en place des méthodes de pesage automatique des containers.

Les deux autres paramètres appellent en revanche des méthodes de redressement plus complexes. Les opérations de contrôle répondent à un double objectif: maximiser la recette douanière et lutter contre la concurrence déloyale. 

Un enjeu double: la collecte douanière et la lutte contre la concurrence déloyale

Zouhair Chorfi nous explique très clairement le double enjeu pour les douanes: assurer l’une des plus importantes recettes fiscales et garantir une concurrence loyale entre les opérateurs.

Pour un pays comme le Maroc qui a importé 380 MMDH de marchandises et de services en 2014, la recette douanière contribue significativement à la recette publique, approximativement 40% des recettes fiscales.

Le démantèlement tarifaire progressif avec l’UE, les USA et la Turquie entraîne pour les douanes un manque à gagner de 400 MDH. Les opérations de contrôle mises en place pour la collecte douanière relèvent donc avant tout d’un enjeu crucial pour les finances publiques.

La lutte contre la sous-facturation se matérialise par des rentrées additionnelles de taxes douanières. En 2014, les administrations douanières ont ainsi redressé pour 7,6 MMDH de valeur, lequel redressement a permis de recouvrer un manque à gagner de 2,6 MMDH de taxes!

 Le deuxième enjeu est d’ordre économique, et relève de la concurrence loyale entre les opérateurs. C’est le cas de la lutte contre les fausses déclarations, en s’assurant que tous les importateurs soient soumis aux mêmes règles tarifaires.

Lorsqu’un importateur contrevient à la règle tarifaire en établissant de fausses déclarations, il créé des distorsions de marché à l’encontre des autres importateurs et des opérateurs locaux. C’est pourquoi les opérateurs économiques coopèrent volontiers avec l’administration des douanes lorsqu’ils pâtissent de l’entrée de produits bon marché défiant toute concurrence, en informant sur les prix moyens des produits importés. Le comité national contre la fraude qui siège aux douanes, détermine ainsi des secteurs sensibles prioritaires, comme le textile et l’aluminium, sur lesquels la fraude est répandue.

La recherche complexe de la juste valeur

Pour mener ces opérations de contrôle, les douanes se sont dotées d’une base de données sur les référentiels valeurs. Constituée en concertation avec des opérateurs de différents secteurs économiques, cette base donne pour un certain nombre de références douanières un prix minimum. Si la valeur déclarée est inférieure à ce prix minimum, les contrôleurs reçoivent l’alerte d’un risque de minoration de prix.

Pour constituer et actualiser cette base, l’administration des douanes a élaboré un ensemble de techniques de détermination de la fourchette de prix juste. 

C’est au Comité National de Lutte contre la Fraude que se joue la constitution des référents, lequel réunit aux douanes les ministres de l’industrie et du commerce extérieur ainsi que des fédérations professionnelles. En complément, la douane exploite les historiques des déclarations antérieures  et les prix publics de marché qui permettent de reconstituer un prix raisonnable d’importation.

Les bases de données couvrent désormais à peu près 80% des positions tarifaires (17.000 positions) et l’essentiel des produits structurants de la balance commerciale.

La base de données est désormais nationale et disponible à tous les opérateurs portuaires, évitant ainsi tout effet d’opportunité entre les différents ports.

La détermination du prix est évidemment complexe, et de l’avis de M. Chorfi, les référentiels sont encore minorés. Au sein d’une même position tarifaire, les produits peuvent être très hétérogènes, en fonction de la main d’œuvre, de la marque, de la gamme, et se verront pourtant appliquer le même minimum.

Toutefois, cette démarche joue un effet dissuasion sur l’importateur à qui ne sont pas révélés les seuils de prix.

Plus de collaboration avec les pays partenaires sur la règle d’origine

La fausse-déclaration d’origine est un autre mode opératoire des contrevenants. Les niveaux de taxation différenciés selon l’origine, peuvent par exemple inciter les opérateurs àpasser par l’Europe pour conférer une origine européenne àun produit asiatique en y ajoutant une valorisation superficielle.

Ces opérateurs peuvent ainsi recevoir un certificat EUR1 de la main peu vigilante d’un douanier européen. Le certificat atteste alors de l’origine européenne du pays. La lutte contre la fausse-déclaration inclut donc pour l’administration marocaine de demander confirmation de l’origine à l’autorité émettrice du certificat, lorsqu’elle a un doute sur le respect des règles d’origine.

Ces opérations en douane se doublent de négociations au sommet avec les partenaires d’accords d’association pour faire du contrôle sur la règle d’origine une priorité.

Enfin, pour le douanier en chef, les accords de libre échange doivent être négociés plus en avant, afin de réduire le différentiel entre l’UE, les USA, le monde arabe d’une part, et le reste du monde d’une autre part.

Le démantèlement tarifaire entre 2008 et 2012 a conduit à passer de 6 à 4 taux. Cette fraude sur l’origine révèle une demande avérée de produits concurrentiels venant d’autres pays. Pour que le Maroc puisse bénéficier d’un commerce extérieur différencié et s’ouvrir à de nouvelles sources d’importation, le démantèlement tarifaire doit se poursuivre.

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