La démission de Mezouar plonge la CGEM dans un débat juridique sans précédent

Après la démission de Salaheddine Mezouar de la présidence de la CGEM et en l'absence d'un vice-président général pour assurer l'intérim, le patronat se trouve dans une situation inédite que seul le Conseil d'administration pourra régler.

La démission de Mezouar plonge la CGEM dans un débat juridique sans précédent

Le 14 octobre 2019 à 14h25

Modifié 11 avril 2021 à 2h43

Après la démission de Salaheddine Mezouar de la présidence de la CGEM et en l'absence d'un vice-président général pour assurer l'intérim, le patronat se trouve dans une situation inédite que seul le Conseil d'administration pourra régler.

La démission de Salaheddine Mezouar de la présidence de la CGEM, après son recadrage par le gouvernement à propos de ses déclarations sur l'Algérie, met le patronat dans une situation délicate dans un timing où tous les efforts auraient dû être orientés vers les discussions autour du projet de loi de finances 2020. 

Mais voilà, la confédération est aujourd'hui sans président. Elle est plongée depuis l'annonce de la démission de Mezouar dimanche 13 octobre dans le flou le plus total. 

Cela intervient alors que la CGEM a vécu ces derniers mois plusieurs tensions relatives à ses instances de gouvernance. Plusieurs démissions ont été enregistrées dont celle du vice-président Faïçal Mekouar en juillet dernier

Donc, la situation dans laquelle se trouve le patronat est inédite. La CGEM se trouve désormais sans président, sans vice-président, avec un nouveau directeur général délégué...

Selon nos informations, une réunion du bureau de la CGEM, convoquée en urgence, s'est tenue le dimanche dans la soirée, vers 21h, pour discuter de la marche à suivre. Les membres du bureau sont restés jusque tard dans la nuit mais aucune décision n'a été prise.

Deux questions doivent être tranchées:

- la première est celle relative à la personne qui assurera l'intérim.

- la seconde est celle de la convocation de l'assemblée générale pour organiser de nouvelles élections dans un délai de trois mois. 

Qui pour l'intérim ?

"Il y a encore des discussions sur certains points... parce qu'il n'y a pas que les textes, il y a aussi la perception par les uns et les autres. La perception est très importante", nous explique une source bien informée. 

Les différentes sources questionnées nous confirment qu'il existe un débat animé en interne au sujet des questions statutaires. 

Car les statuts de la CGEM, bien qu'ils évoquent dans l'article 19.2 la démarche à suivre en cas de démission du président, ne prévoient pas ce qu'il faut faire s'il n'y pas non plus le vice-président pour assurer l'intérim. 

L'article 19.2 dispose : "En cas de cessation définitive de fonction du (ou de la) Président(e) en raison d’un décès ou d’une démission ou de toute autre cause entraînant une absence ou un empêchement permanent, le Conseil d’Administration est tenu de convoquer, dans les trois (3) mois de la vacance du poste de Président(e), l’Assemblée Générale Ordinaire afin d’élire un nouveau (ou une nouvelle) Président(e) et un nouveau (ou une nouvelle) Vice-président(e) Général(e). A défaut, la convocation peut être faite à la demande : - de un tiers (1/3) des membres du Conseil National de l’Entreprise ; - de un cinquième (1/5) des membres de la CGEM disposant du droit de vote.  La cessation de fonction du ou de la Président(e) emporte de plein droit la cessation de celle du ou de la Vice-président(e) Général(e). Cependant, celui-ci ou celle-ci assure, en sus de sa fonction de Vice-président(e) Général(e), la fonction de Président(e) jusqu’à l’élection de nouveaux ou nouvelles Président(e) et Vice-président(e) Général(e) en expédiant les affaires courantes de la CGEM".

Il est clair que la question de la convocation de l’assemblée générale n’est pas un problème en soi tant les statuts sont clairs là-dessus.

En plus, un Conseil d’administration est déjà prévu pour le mercredi 16 octobre, convoqué par le président Salaheddine Mezouar avant sa démission. Selon les sources sondées par Médias24, jusqu’à la soirée de ce lundi 14 octobre, le conseil est maintenu. "La solution la plus simple techniquement est de le maintenir pour traiter cette urgence", commente une source de la CGEM. Cela dit, rien n’est sûr.

Et même si ce conseil n’est pas maintenu ou que les membres de la CGEM veulent convoquer un autre conseil d’administration, il leur est possible de le faire par le cinquième (1/5) au moins des membres du conseil d’administration comme il est prévu dans l’article 24.1.

Donc la question qui préoccupe réellement les membres du patronat est celle de l’intérim qui assurera la gestion des affaires courantes de l’organisation patronale en attendant l’élection d’un nouveau binôme. Et c’est cette même question qui divise car les statuts ne prévoient pas d’autre intérim que le Vice-président général. Or, ce poste est vacant.

"L'intérim aurait été naturel si on avait un vice-président général. Comme nous ne l'avons pas, nous n'aurons pas d'intérim. A mon sens, la seule voie légale et juridique, c'est de convoquer une assemblée générale. Je pense que l'on prendra un peu de temps avant de décider", nous confie un membre de la CGEM.

"Il y a une autre lecture qu'il faut avoir, c'est quand le président démissionne, beaucoup de postes disparaissent par ricochet. Tous les membres désignés par lui doivent partir avec lui", ajoute notre interlocuteur.

Que faire des membres désignés ?

Que disent les statuts ?  C’est l’article 23.3 qui traite des membres désignés par le conseil d’administration.

"Sur proposition du ou de la Président(e), les membres de droit du Conseil d’Administration peuvent désigner des membres du Conseil d’Administration supplémentaires, dans la limite de tiers (1/3) des membres de droit. La parité entre hommes et femmes doit être respectée dans la désignation de ces membres. Le Conseil d’Administration délibère sur cette matière à la majorité simple ; en cas de partage égal de voix, celle du ou de la Président(e) sera prépondérante. Les modalités du vote seront déterminées par le Règlement Intérieur. Par ailleurs, le Conseil d’Administration désignera dans le cadre de ces nominations, des représentants de la CGEM à la Chambre des Conseillers et des personnes en situation de handicap. Ces membres sont à choisir parmi les représentants légaux des membres de la CGEM et sont nommés pour une durée qui prendra fin automatiquement à l’échéance du mandat du ou de la Président(e).

"En cas de vacance d’un poste de membre de Conseil d’Administration autre que celui de droit, le Conseil d’Administration, sur proposition du ou de la Président(e), pourvoit à son remplacement et ce, pour la période restant à courir du mandat du membre remplacé".

Et là c’est un autre débat juridique qui est lancé. "En effet, en lisant les statuts, tout le monde pense que le mandat des administrateurs désignés par le président a pris fin hier avec la démission de Mezouar. Mais pour les présidents des commissions, il y a un doute, chacun y va de son interprétation", nous précise un autre membre de la CGEM.

Ce sujet est d’autant plus sensible que le nombre des membres désignés par le président avait été au cœur d’une polémique qui a soulevé des questions d’éthique et de respect des statuts qui ont failli faire imploser la CGEM au début du mandat de Mezouar.

>> Lire aussi : La CGEM trouve un compromis transitoire au sujet du nombre d'administrateurs

Tout l’enjeu actuellement est de trouver une solution qui soit acceptée par tous et loin des velléités des différents courants qui existent au sein du patronat.

C’est ce qui fait dire à ce membre du conseil d’administration de l’organisation patronale qu’il faut une consultation juridique de haut niveau suivie d'un consensus. "Si cette consultation ne se fait pas, la CGEM trainera ce problème pendant des semaines voire des mois", ajoute ce membre.

Que faire ? la question reste entière. Mais pour cet autre membre de la confédération, le dilemme que vivent les hommes d’affaires ne peut être réglé que dans le cadre du conseil d’administration.

"L'organe qui a le plus de pouvoir après l'assemblée générale, c'est le conseil d'administration. Il a les pouvoirs les plus étendus et il est donc à même de prendre ce genre de décisions. Aujourd'hui, n'importe quelle solution à adopter par la CGEM doit passer par le conseil d'administration. Il faut que le conseil reprenne le pouvoir et décide de la meilleure suite possible qui peut prendre la forme d'une transition ou autre. L’essentiel, c’est que le conseil doit reprendre les choses en main. Tout le monde est d'accord là-dessus et c'est la seule solution", avance notre source.

Quid alors du Bureau du conseil d’administration qui a d’ailleurs tenu une réunion dimanche 13 octobre ? Selon cette même source, le bureau "n'est pas capable statutairement parlant de gérer, prendre des décisions ou de délibérer sur quoi que ce soit. Ce n’est qu’un organe de consultation et il n'a pas de pouvoir en soi", tranche-t-il.

Au niveau des statuts, la mission du bureau du Conseil d’Administration se limite à "se prononcer sur toutes les questions qui lui sont soumises par le ou la Président(e). Ses réunions donnent lieu à l’établissement d’un procès-verbal signé par le ou la Président(e) ou au moins deux membres du bureau", sans plus.

Les regards restent donc rivés vers la CGEM et les décisions qui seront prises dans les prochains jours seront décisives pour l'avenir du patronat des hommes d'affaires. 

A suivre.

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