Tourisme : les nationaux seront-ils au rendez-vous après le déconfinement ?

Avec la fermeture des frontières internationales, les Marocains désireux de prendre des vacances après la fin du confinement, n’auront d’autre choix que de rester au Maroc. Si pour un professionnel de Marrakech, cette situation fera certainement décoller le tourisme interne, le président du groupe Atlas Voyages, Othman Cherif Alami, pense tout le contraire en affirmant que l’offre actuelle des structures hôtelières n’est pas du tout adaptée au budget de la clientèle locale.

Tourisme : les nationaux seront-ils au rendez-vous après le déconfinement ?

Le 21 mai 2020 à 21h32

Modifié 11 avril 2021 à 2h46

Avec la fermeture des frontières internationales, les Marocains désireux de prendre des vacances après la fin du confinement, n’auront d’autre choix que de rester au Maroc. Si pour un professionnel de Marrakech, cette situation fera certainement décoller le tourisme interne, le président du groupe Atlas Voyages, Othman Cherif Alami, pense tout le contraire en affirmant que l’offre actuelle des structures hôtelières n’est pas du tout adaptée au budget de la clientèle locale.

Lors d’une récente intervention au Parlement, la ministre du tourisme, Nadia Fettah, avait annoncé que la reprise de l’activité du secteur touristique passerait d’abord par le tourisme interne.

Les nationaux seront-ils au rendez-vous après la fin du confinement ? Tout dépendra de l'offre estivale que dévoilera le secteur pour les Marocains.

En attendant, les avis divergent. Certains affirment que des opérateurs adaptent déjà leurs produits pour séduire les nationaux qu'ils pensent être nombreux à vouloir fréquenter les établissements hôteliers tandis que d'autres s'attendent à un afflux modéré compte tenu de l'inaccessibilité de l'offre hôtelière classique pour le tourisme de masse. 

Un été entre Marocains

Joint par Médias24, un professionnel de Marrakech-Safi-Essaouira affirme que le CRT de la région prépare aux touristes nationaux 3 produits estivaux tournés vers l’océan, le désert et la montagne.

Se basant sur les contraintes (frontières fermées) et des études prospectives, notre interlocuteur affirme que certains opérateurs s’attendent, pour la 1ère fois de leur histoire, à faire le plein avec une clientèle 100% marocaine.

« A l’issue du confinement, ils pensent que les Marocains vont voyager en masse et provoqueront même de gros embouteillages sur les routes nationales.

Des produits hôteliers pour les Marocains

« Prévoyants, ils ont aménagé à 30 kilomètres de la ville ocre des camps d’hébergement où les clients pourront séjourner dans le désert d’Agafay, zone idéale pour les amateurs d’espace et de plein air.

« Un autre projet, mené par les agences de voyages de Marrakech et Casablanca, propose aux nationaux des produits hôteliers entre Safi et Essaouira qui comptent une quinzaine de plages magnifiques avec un package largement abordable compris entre 500 et 1.000 dirhams la nuitée », révèle notre source en ajoutant qu’il y aura aussi des produits pour ceux dont le pouvoir d’achat s’est détérioré avec la crise.

« Pour éliminer les risques sanitaires et rassurer un maximum de touristes Marocains censés remplacer les étrangers, les pouvoirs publics élaborent avec les hôteliers un référentiel de mesures préventives comme, par exemple, une distance de plusieurs mètres entre chaque famille d'estivants à la plage.

Le tourisme rural va détrôner les grandes chaînes hôtelières

« Les Marocains privilégieront certainement le tourisme de terroir dans l’arrière-pays qui n’est pas bondé d'habitude .

« Nos études montrent que ce type de tourisme a de fortes chances d’exploser mais ça sera au détriment des grandes chaînes hôtelières urbaines dont les prix restent inaccessibles pour beaucoup de familles et dont les gens vont se méfier compte tenu de la pandémie plus urbaine que rurale.

« Aucun grand hôtel des centres urbains ne devrait par conséquent faire le plein et certains devraient même rester fermés au moins jusqu’au retour de la clientèle étrangère qui possède un budget plus adapté que les touristes locaux.

« Pour ceux qui ouvriront, il y aura des contrôles stricts des autorités pour vérifier s’ils respectent les mesures de sécurité sanitaire qui deviendront la norme dans l’hôtellerie.

« Mais les seuls établissements à même d’obtenir un taux d’occupation correct seront ceux qui pratiqueront des tarifs abordables qui ne dépassent pas les 1.000 dirhams la nuitée, pour une famille entière.

« Les autres grandes structures à 2.000-3.000 DH devront soit s’aligner soit rester fermées et attendre la réouverture des frontières et le retour des touristes étrangers de séjour », conclut notre interlocuteur pour qui ça ne sera pas le cas avant décembre.

"Une grande partie du parc hôtelier sera ouvert en août"

Questionné sur l’agenda de réouverture du parc hôtelier, Othman Cherif Alami, PDG du groupe Atlas Voyages, pense que la pandémie devrait être maîtrisée avant l’été et que les dispositifs sanitaires avec des normes strictes seront opérationnels dans les hôtels à la fin du mois de juin, et au plus tard début juillet

« A partir de cette date il devrait y avoir un déconfinement progressif entre les villes pour arriver, peut-être, à une large ouverture des établissements au 1er août.

« Si les ouvertures s’étendront du 1er juillet au 1er août, beaucoup d'hôtels ne rouvriront pas de sitôt comme à Casablanca où il n'y aura toujours pas de touristes d'affaires et dont une bonne partie de la clientèle marocaine qui aimait y venir n'aura plus de moyens de se payer un 4 ou 5 étoiles

« Pour les mêmes raisons, plusieurs hôtels-club de Marrakech n’ouvriront pas avant le 1er octobre », nous explique le patron du 1er tour-opérateur du Maroc.

Tanger-Tétouan et Agadir, principales destinations des nationaux

Sur les produits touristiques qui devraient marcher en juillet et en août, Alami déclare que les résultats d’un récent sondage de son groupe a mis en avant trois grandes destinations.

« Celle qui obtient le plus de suffrages est la région du nord Tanger-Tétouan où il y a une forte demande de location d’appartements ou villas meublées et de séjours hôteliers dans des 4 étoiles ou des clubs de vacances 5 étoiles pour une durée d’une semaine à dix jours.

« En deuxième lieu, la ville d’Agadir est en bonne place grâce à la station balnéaire de Taghazout qui compte de nombreuses unités hôtelières.

« Au total, entre le Nord et Agadir cela représente environ 80% de la demande nationale soit respectivement une attractivité de 50% et de 30%.

« Les derniers 20 % sont constitués par l'axe Atlantique Essaouira-El Jadida-Casablanca où nous avons eu déjà un certain nombre de réservations en ligne pour juillet et août », révèle Alami.

Aucune baisse à venir des prix des séjours hôteliers

A la question de savoir si les prix des séjours hôteliers allaient baisser pour s’ajuster au budget des nationaux, le président affirme que ce n’est pas le cas chez Atlas Voyages ou même Booking.com.

« L’absence d'ajustement tarifaire s'explique par des contraintes de rentabilité.

En effet, quand vous ouvrez un hôtel de 400 chambres et vous n'exploitez que 200 chambres parce que vous ne pouvez pas en louer plus, vous devez quand même payer le loyer des 400 chambres. Idem pour le prix des assurances hôtelières annuelles qui ne changent pas et ne peuvent être divisées par le nombre de clients réels. 

« Ainsi pour vous donner un exemple concret, à la station balnéaire de Saïdia, la nuitée en formule all exclusive à l’hôtel Iberostar est toujours à 2.000 dirhams.

Les grosses charges empêchent donc ce genre de grandes structure de baisser les prix pour accueillir davantage de touristes nationaux qui ont un pouvoir d’achat moindre.

Le tourisme de masse évite les hôtels pour louer des appartements plus abordables

Selon notre interlocuteur, le tourisme de masse se tourne plus vers des appartements que des produits hôteliers.

"En effet, les touristes nationaux préfèrent des locations d’appartements meublés comme à Martil où la nuitée coûte en moyenne 600 dirhams pour une famille de 4 personnes contre plus de 1.000 à l’hôtel.

« Si les recommandations de la vision 2020 qui prévoyait la construction de 20 stations Biladi avaient été menées à terme, on aurait pu accueillir un nombre beaucoup plus important de touristes internes dans ces sortes de club Med low cost.

Pas assez d’infrastructures low-cost pour le tourisme interne

« Le problème est qu’il y en a très peu comme celle, par exemple, d’Ifrane qui sera sûrement bondée cet été.

Ainsi, ses appartements qui comptent un salon et deux chambres rencontrent beaucoup de succès car non seulement ils sont situés dans un environnement fabuleux mais en plus ne coûtent que 350 à 450 DH la nuit.

« Hormis le manque d’infrastructures d’hébergement adaptées à la bourse de la majorité des Marocains, les parents pauvres du tourisme à savoir les camping sont dans un état lamentable sans aucun entretien.

«Cette niche lucrative pourrait être développée en créant au moins une trentaine de camping avec des mobile-home en time-share dans des lieux magnifiques avec tout le confort et équipements possibles (piscine, infirmerie, terrains de sport…) », regrette Alami en concluant que pour toutes ces raisons, le tourisme interne ne sera certainement pas au rendez-vous espéré pour l’été prochain.

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