Agrumes. Les producteurs s’attendent à une campagne en deçà de leurs espérances

Après une année de forte chute des volumes produits et exportés, la saison qui s’annonce devait être prometteuse, l'arbre d'agrumes alternant en principe les années bonnes et les moins bonnes. Mais l’assèchement des barrages et la rareté de l’eau font perdre tout espoir en une relance de la production et des exportations, avec ce que cela comporte comme impact sur toute la filière.

Agrumes. Les producteurs s’attendent à une campagne en deçà de leurs espérances

Le 9 octobre 2020 à 14h44

Modifié 11 avril 2021 à 2h48

Après une année de forte chute des volumes produits et exportés, la saison qui s’annonce devait être prometteuse, l'arbre d'agrumes alternant en principe les années bonnes et les moins bonnes. Mais l’assèchement des barrages et la rareté de l’eau font perdre tout espoir en une relance de la production et des exportations, avec ce que cela comporte comme impact sur toute la filière.

La filière agrumicole vit une situation assez particulière. Après une saison 2019-2020 où les volumes produits et exportés ont fortement chuté, les professionnels du secteur s’attendaient à une relance de la production en cette saison 2020-2021 qui démarre en octobre.

Un espoir qui se base sur un principe bien connu dans le métier : l'arbre d'agrumes alterne les années bonnes et les moins bonnes. Après une année de forte production, les arbres sont fatigués par la charge trop forte et produisent moins. Et inversement.

Donc la tendance cette année devait être à la hausse. Mais cet espoir se voit aujourd’hui cassé par le phénomène de rareté de l’eau et l'assèchement des barrages causé par la succession de deux années de sécheresse.

Des centaines d’hectares abandonnés par manque d’eau

« Le gros sujet aujourd’hui, c’est le manque d’eau. Nous sommes dans une culture de micro-irrigation à 100%. Avec l’assèchement des barrages et le manque d’eau, il y a certains producteurs qui ont été obligés de réduire la surface cultivée pour gérer ce phénomène », confie un professionnel du secteur.

Sur un terrain de 20 ha par exemple, le producteur arrête carrément la production sur 10 ha pour concentrer l’eau dont il dispose sur les 10 ha restants. « Il y a des centaines d’hectares qui sont concernés aujourd’hui par ce phénomène », ajoute notre source.

Dans la région de Béni Mellal, le phénomène est particulièrement ressenti par les producteurs qui comptent pour leurs cultures sur les eaux du barrage Bin El Ouidane. Ce barrage affiche aujourd’hui un taux de remplissage d’à peine 21,4 % contre 45,6% il y a un an.

Un phénomène qui concerne toute la région de Tadla et du Haouz qui participent à 13% de la production globale d’agrumes. « La région n’a jamais été autant impactée de son histoire par ce phénomène de rareté de l’eau », commente notre source. En moyenne, les barrages de la région affichent un taux de remplissage actuel de 17,4% contre un taux de 30,9% à la même période de l’année 2019.

Idem pour la région du Souss, grande productrice d’agrumes, qui connaît également un grand stress hydrique avec un taux de remplissage moyen des barrages dédiés à l'irrigation d’à peine 28% contre 53,4% il y un an.

En résumé, l’arbre est prêt pour produire plus que l’année dernière, mais il n’y a pas assez d’eau pour l’irriguer. « La saison précédente était faible en production. On s'attendait donc à une bien meilleure campagne cette saison. Mais en réalité, on va avoir une campagne très moyenne voire faible en raison notamment de l'impact de la sécheresse ».

Un effet prix pour sauver les recettes des producteurs ?

Ceci étant dit, la faiblesse du tonnage ne se traduit pas forcément par une baisse du chiffre d’affaires du producteur. Pendant la saison 2019-2020, les exportations d’agrumes ont baissé de 26% selon nos sources, passant d’un volume de 715 000 à 526 000 tonnes.

Certaines variétés ont été plus touchées que d’autres. Comme les clémentines, dont les exportations ont chuté de 50% à 152.000 tonnes, ou encore la Nour (-70% à près de 33.000 tonnes). De fortes variations à la baisse contrebalancées, en volume, par la hausse des écoulements à l’international de la Nadorcott (+35% à 188.000 tonnes) et de la Maroc Late (+52% à 103.000 tonnes).

« Malgré la baisse globale du volume à l’export, les prix ont connu une nette hausse sur la saison dernière en raison de la faible production au niveau mondial, notamment en Espagne et en Egypte. Cet effet prix a compensé la baisse des volumes. Car finalement, ce qui compte pour le producteur, ce n’est pas tant les volumes produits ou exportés mais la recette par hectare », explique une source sectorielle.

Avec la baisse des volumes qui s’annonce cette saison, les producteurs peuvent-ils compter sur un nouvel effet prix pour compenser leurs pertes ? Pas si sûr, répondent nos sources.

« L’année dernière a été particulière. Les prix ont augmenté car l’offre mondiale a baissé. Mais cette année, la production espagnole, égyptienne et turque va monter en volume. Le problème de l’offre ne se posera pas. Le Maroc sera le seul pays concerné par cette baisse de la production en raison de la rareté de l’eau. Les prix ne vont donc pas augmenter, mais seront corrects », précise une de nos sources.

Autre problème soulevé qui empêchera les Marocains de placer leurs produits à des prix convenables : la baisse de la qualité du fruit. « La sécheresse agit fortement sur la qualité du fruit et son calibrage. Nous ne serons donc pas en position de négocier des prix à la hausse », ajoute notre source.

En gros, les professionnels du secteur

s'attendent à des volumes un peu plus élevés que l'année dernière, mais loin très loin de ce qui était espéré ou attendu. Le total export espéré cette année est à ce stade de près de 500.000 tonnes (200.000 à 250.000 t pour la clémentine, 180.000 t pour la Nadorcott et 50.000 t pour la Nour). Mais des recettes moindres à cause de la tendance attendue sur le prix des différents produits.

Effet domino sur toute la chaîne de valeur

La baisse du volume n’est donc pas forcément mauvaise pour un producteur. Mais une chose reste sûre : elle produit un impact direct sur toute la chaîne de valeur, de la cueillette au conditionnement en passant par le transport.

Pour ces activités liées à l'agriculture et qui emploient des milliers de personnes, une nouvelle année de faibles volumes équivaut à moins d’activité, moins de jours de travail, moins de revenus pour des centaines d'entreprises et des milliers de ménages…

La saison dernière, par exemple, les stations de conditionnement n’ont travaillé selon nos sources qu'aux deux tiers de leurs capacités. « C’est des revenus en moins pour ces entreprises. Et des milliers d’emplois qui sont touchés », explique une source du secteur.

Avec les prévisions de production avancées par les professionnels, ces acteurs de la chaîne, journaliers agricoles, transporteurs et employés des stations de conditionnement, devront vivre encore au ralenti cette année, avec moins d’activité et moins de revenus.

Seul espoir en une reprise de la production et par ricochet d’une relance de toute la chaîne de production : la pluie, encore et toujours.

« C’est un constat malheureux, mais le fait est qu’on reste à la merci des précipitations. Les barrages du Souss, du Haouz, de Tadla et de l’Oriental doivent se remplir pour irriguer la culture. Faute d’autres ressources hydriques mobilisables, on reste toujours dépendants du bon vouloir du Ciel », conclut, dépité, un grand producteur.  

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