Allégations algériennes : lecture et réaction d’un expert militaire

Au lendemain de la publication d’un communiqué de presse de la présidence algérienne accusant les forces armées royales d’avoir tué "3 innocents routiers dans une zone ouverte au trafic commercial civil", Médias24 a fait réagir un expert militaire sur ces allégations.

Allégations algériennes : lecture et réaction d’un expert militaire

Le 4 novembre 2021 à 20h30

Modifié 5 novembre 2021 à 1h44

Au lendemain de la publication d’un communiqué de presse de la présidence algérienne accusant les forces armées royales d’avoir tué "3 innocents routiers dans une zone ouverte au trafic commercial civil", Médias24 a fait réagir un expert militaire sur ces allégations.

Révélée par le site algérien Mena Défense, la mort de "3 routiers civils" algériens a ensuite fait l’objet, lundi 3 novembre, d’un communiqué de presse de la présidence algérienne qui a accusé les Forces armées royales (FAR) d’avoir attaqué, lundi 1er novembre, deux camions et tué ses trois occupants qui étaient à l’arrêt sur l’axe Nouakchott-Ouargla.

"Le risque d’une attaque algérienne n’est désormais plus à exclure"

Sachant que le contenu de ce communiqué fait état d’un "bombardement" dans "une zone ouverte aux échanges commerciaux entre les peuples de la région", Médias24 a sollicité la lecture d’un expert en affaires militaires qui connaît parfaitement cette zone, où il s'est de nouveau rendu récemment.

Interrogé sur un risque de guerre entre le Maroc et l’Algérie après les menaces du président algérien de ne pas laisser impuni "ce lâche assassinat", notre interlocuteur n’a pas exclu une attaque surprise du voisin de l’Ouest si les généraux, qui disposent du vrai pouvoir en Algérie, devaient persévérer dans leur escalade anti-marocaine

"L’Algérie ne bénéficiera d’aucun soutien de la communauté internationale"

"Quoi qu’il advienne, il paraît à tous inconcevable de déclencher un conflit pour un tel motif, d’autant que l’Algérie ne bénéficiera d’aucun soutien de la communauté internationale.

"Ainsi, contrairement à ce que certains pensent, la Russie ne sera pas de son côté, sans quoi elle ne se serait certainement pas abstenue de voter la résolution du Conseil de sécurité et aurait mis son véto."

Sur la menace du président Tebboune de mener "une guerre sans fin et de faire payer un prix très cher à l’ennemi", notre expert souligne que la communauté internationale ne permettra jamais de laisser s’éterniser un conflit entre le Maroc et l’Algérie.

"En effet, il est inimaginable que les grandes puissances assistent sans réagir au déclenchement d’une guerre aux portes de l’Europe, pour un motif en réalité étroitement lié à la situation intérieure de l’Algérie."

Si l’Algérie aura du mal à bénéficier d'un soutien étranger, elle trouvera cependant toujours des fournisseurs de munitions nécessaires pour faire perdurer un conflit- pain bénit pour les marchands d’armes.

"Une crise économique intérieure qui ne se prête pas à une guerre"

Ces derniers ne cracheront pas sur son argent, mais il n’est pas sûr que l’Algérie, qui traverse une crise économique très grave, dispose véritablement de moyens pour financer une guerre.

Ses réserves de change sont en effet actuellement très modestes, et les recettes actuelles d’exportation ne profitent pas encore de la hausse mondiale des prix du gaz et du pétrole.

Il lui faudra attendre plusieurs mois avant de pouvoir bénéficier de la hausse des cours des énergies fossiles.

"Une réponse qui prendra la forme d’une implication plus forte aux côtés du Polisario"

À la question de savoir quelle forme pourrait prendre "la réponse musclée" promise par le régime algérien, notre interlocuteur pense qu’elle consistera surtout à accélérer la collaboration avec le polisario, dans le cadre du pacte de défense commun signé avec l’organisation séparatiste.

"Hormis une fourniture croissante d’armement lourd, il pourrait également y avoir une implication beaucoup plus forte de l’armée algérienne dans les hostilités, y compris avec des soldats algériens aux côtés des milices séparatistes sur la ligne de front, à savoir dans la zone tampon proche du mur de défense marocain."

"Que faisaient des civils algériens dans une zone de guerre ?"

Cela dit, comment vont-ils expliquer à l’opinion mondiale leur guerre directe ou indirecte contre le Maroc accusé d'avoir tué trois personnes qui se trouvaient, de l’aveu même de l’Algérie, dans une zone de guerre ?

C’est d’ailleurs l’occasion de se poser la question de savoir ce que faisaient ces civils dans cette région car, en toute logique, ils ne devaient pas se trouver dans la zone tampon à quelques kilomètres de Bir Lahlou, qui fait partie de la zone de délimitation 27-40 incluse dans l’accord militaire numéro 1 signé par les deux parties.

Contrairement à ce que prétendent les Algériens, ce n’est pas une route internationale pour acheminer des denrées alimentaires vers la Mauritanie.

Et même si c’était le cas, l’habitude d’emprunter ce trajet proche d’une zone de guerre n’a pas force de loi et soumet ceux qui s’y aventurent à de gros risques.

Encore une fois, sachant que depuis la rupture unilatérale du cessez-le-feu en novembre 2020, l'Algérie ne cesse de répéter que c’est une zone où se déroule un intense conflit, pourquoi envoyer des civils dans ce théâtre d'opérations militaires ?

Une attitude d’autant plus étrange que le polisario a récemment accueilli au même endroit des journalistes étrangers, qu’il a ensuite abandonnés sur place.

Cherchait-il à en faire des martyrs, dans le but de donner plus de visibilité médiatique à sa cause, en faisant passer le Maroc pour un assassin de journalistes ?

"Des camions calcinés étrangement intacts"

Sur l'accusation algérienne d’un tir de missile d’un drone ou d’un obus par l’artillerie marocaine, à partir du mur de défense, contre les deux camions et leurs trois occupants, notre interlocuteur relève qu’aucun cratère n'est apparent sur les photos publiées par la Minurso (Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental).

"Pour tout expert avisé, la version d’un tir de missile ou d’un obus ne tient absolument pas la route, car tous leurs clichés montrent des camions calcinés mais quasiment intacts."

En observant attentivement les images, la version la plus plausible est que ces camions ont pris feu, mais pour l’instant, personne ne connaît la réalité des faits, y compris la source marocaine qui a affirmé que les camions avaient sauté sur des mines, alors que les images ont montré qu’ils étaient à l’arrêt total.

"Une manipulation algérienne n’est pas à exclure"

Selon notre expert, il n’est pas impossible que ces chauffeurs transportaient en réalité une cargaison d’armes ou d'explosifs destinés au Polisario, et qu'un incident ait provoqué une explosion et un incendie.

D’autres observateurs n’excluent pas une version malveillante selon laquelle le pouvoir algérien aurait froidement sacrifié ses trois concitoyens pour pouvoir accuser le Maroc de les avoir assassinés.

Il ne faut pas oublier que le même procédé avait été utilisé après les incendies en Kabylie et le lynchage d’un militant du Hirak.

Des événements qui avaient été attribués au bouc émissaire préféré du pouvoir algérien : le Maroc.

En effet, sachant que le véritable ennemi de l’Algérie n’est pas le Maroc mais le mouvement contestataire du Hirak, la diabolisation de notre pays est un moyen très commode de détourner l’attention de ses citoyens.

"Le rapport d’enquête de la Minurso devrait clarifier la situation"

"Reste à espérer que les experts de la MINURSO réussiront à démêler le vrai du faux, avec les débris et les carcasses retrouvées dans cette zone qui se trouve à l’intersection des frontières entre le Maroc, l’Algérie et la Mauritanie."

Il faut aussi rappeler que cette zone tampon, qui a fait l’objet d’un accord avec l’Organisation des Nations unies (ONU) en 1991, est considérée comme marocaine, et que toute personne étrangère qui s’en approche peut être tirée à vue.

En effet, jusqu’au cessez-le-feu de 1991, l’armée marocaine y était bien présente, avant de se retirer et de laisser la Minurso en faire une zone tampon. .

"Mais encore une fois, et contrairement à la propagande du polisario et de son mentor algérien, c’est un territoire marocain qui n’est absolument pas libéré", explique l'expert, rappelant qu’il s'y est rendu souvent.

"La situation est très calme dans les remblais du mur de défense"

"Récemment, des journalistes,  dont une équipe de 2M, ont été autorisés à visiter et surtout à observer toute la zone tampon à partir des remblais du mur de défense.

"Contrairement à ce qu'essaye de faire croire le polisario, la situation y était très calme et personne n'a constaté la moindre hostilité apparente, comme des tirs d’armes lourdes, ou encore moins d’armes légères.

"Juchés sur leurs postes d’observation, les FAR surveillaient 24 heures sur 24 la zone tampon avec leurs guetteurs et leurs radars.

À l’arrière du mur de défense, des milliers de soldats entretenaient l’édifice et les armements déployés, sans compter qu’ils devaient acheminer une logistique impressionnante pour nourrir les troupes et leur assurer de bonnes conditions de travail.

"En cas de confrontation armée, c’est le courage des hommes qui fera la différence, pas l'arsenal militaire"

"Au final, il est très peu probable que le pouvoir algérien déclare une guerre directe au Maroc sans le soutien d’une puissance mondiale, mais encore une fois, il ne faut pas exclure cette éventualité.

"Si, à Dieu ne plaise, l’Algérie décidait d’attaquer, il est difficile de faire un pronostic sur le vainqueur, car dans une guerre, l’important n’est pas l’arsenal militaire, mais le capital humain qui se doit d’être aguerri.

"Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à se remémorer des exemples de la Libye et de l’Irak, qui disposaient des plus grands stocks mondiaux d’armes et qui se sont pourtant fait écraser en quelques jours", conclut l’expert, ajoutant qu’il faudra attendre le discours de la Marche verte pour connaître la première réponse officielle du Maroc aux accusations algériennes.

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