Jazouli-CGEM : convergence certaine sur le diagnostic, une certaine convergence sur les moyens

Voici une rencontre sans langue de bois ni verbiage, comme on aimerait en voir plus souvent. Mohcine Jazouli, Chakib Alj et les autres interlocuteurs de ce face-à-face ont été concrets et francs. Compte rendu.

Mohcine Jazouli

Jazouli-CGEM : convergence certaine sur le diagnostic, une certaine convergence sur les moyens

Le 8 novembre 2021 à 19h47

Modifié 5 mai 2022 à 16h55

Voici une rencontre sans langue de bois ni verbiage, comme on aimerait en voir plus souvent. Mohcine Jazouli, Chakib Alj et les autres interlocuteurs de ce face-à-face ont été concrets et francs. Compte rendu.

À 30% du PIB, l’investissement au Maroc affiche l’un des taux les plus élevés au monde ; mais en générant une croissance économique moyenne de 4% seulement, il s’avère peu efficient. C'est ce que rappelle Mohcine Jazouli, ministre délégué auprès du chef du gouvernement, chargé de l’investissement, de la convergence et de l’évaluation de la politique publique, invité ce lundi 08 novembre à une rencontre avec la CGEM.

Pallier le manque d'efficience de l'investissement

Pour Mohcine Jazouli, ce manque d’efficience s’explique par deux facteurs. D'une part, l’investissement au Maroc est principalement porté par le secteur public, à hauteur des deux tiers. Alors que, dans la majorité des cas, il ne dépasse pas les 15% à l'international.

L’objectif est donc pour le nouveau ministre d’inverser la situation et d’atteindre un ratio de deux tiers pour le secteur privé et un tiers pour le secteur public, à l’horizon 2035. Comme le préconise d'ailleurs le Nouveau Modèle de Développement.

D'autre part, "l’investissement privé n’est pas assez orienté vers les secteurs créateurs d’emploi et de valeur ajoutée". Il se fixe donc comme objectif de cibler les investissements dans les secteurs porteurs offrant le plus d’impact en termes d’emplois, de création de valeur et de souveraineté stratégique.

Par ailleurs, le ministre escompte que l’investissement public record de 245 milliards de dirhams, inscrit dans le projet de loi de Finances 2022, servira de locomotive à l'économie et au secteur privé.

La nouvelle charte de l'investissement, bientôt promulguée

Pour améliorer l’environnement des affaires, la promulgation de la nouvelle charte de l’investissement est prévue "très prochainement". En effet, ce texte de projet de loi, qui en est à sa 65e édition selon le ministre, est attendu depuis fort longtemps par le secteur privé. 

La priorité sera donnée à sa promulgation le plus tôt possible, déclare le ministre. S’ensuivra alors la promulgation des décrets d’application qui prendront en compte les spécificités de chaque secteur.

Dans le même sens, le gouvernement veut faciliter l’acte d’investir à travers "la simplification et la digitalisation des procédures administratives, ainsi que la totale disponibilité des CRI pour fluidifier l’interaction entre l’État, les régions et les opérateurs économiques".

Cette demande émane d'ailleurs de Chakib El Alj, président de la CGEM, qui a cité, dans son intervention, les services douaniers qui en sont “un exemple édifiant”.

Financement des entreprises

La CGEM, qui voit en l’accès au financement une problématique cruciale, recommande de créer une banque publique d’investissement orientée TPME, et d’injecter des quasi-fonds propres via le fonds Mohamed VI pour l’investissement.

Mohcine Jazouli, qui reconnaît que l’entreprise marocaine est sous-capitalisée, rappelle que le fonds Mohammed VI pour l’investissement sera doté de plusieurs outils, dont des sous-fonds qui financeront les entreprises en fonds propres sous forme de private equity

Ce qui imposera aux entreprises marocaines souhaitant en profiter de jouer le jeu de la transparence. Les autres outils de financement prendront la forme de dettes, de dettes mezzanines et de quasi-fonds propres.

Pour lui, ces mécanismes-là, ajoutés à la réforme de la CCG, peuvent se substituer à la demande d’une banque d’investissement publique, formulée par la CGEM.

Un "momentum" à exploiter

Mohcine Jazouli a également invité le secteur privé à investir, pour profiter de ce "momentum", de cette "séquence propice" qui se présente tant au niveau national qu’à l’international.

Il cite la reconfiguration des chaînes de valeur mondiales, l’entrée en vigueur de la taxe carbone dans l’Union européenne et la transformation numérique comme autant d'opportunités à saisir pour dépasser les contraintes géographiques et les barrières logistiques.

Sur ce dernier point, il considère même qu'en raison de la crise que connaît le transport maritime à l’échelle mondiale, la logistique s’est transformée en un élément de compétitivité pour l’économie marocaine.

Jazouli ambitionne enfin de poursuivre et d’encourager la dynamique positive que connaissent les investissements directs étrangers au Maroc.

La compétitivité de l'entreprise au centre des revendications de la CGEM

Pour se repositionner dans les chaînes de valeur mondiales, Chakib El Alj, quant à lui, demande de promouvoir la compétitivité du produit marocain en axant l’effort sur quatre leviers.

Le premier étant le coût de l’énergie ; la CGEM recommande la libéralisation du marché de la moyenne tension et la promotion de l’autoproduction de l’énergie propre, avec la capacité de réinjection dans le réseau. L’objectif, qui va dans le même sens que le Nouveau Modèle de développement (NMD), veut atteindre un coût de 0,5 DH/kWh à l’horizon 2035, au lieu de 1,07 DH/kWh actuellement.

Ensuite il s’agit de rendre disponible un foncier industriel de qualité et compétitif, accessible en vente ou en location. La CGEM recommande, par ailleurs, de forcer les détenteurs de foncier industriel inexploité à remettre le lot sur le marché, au prix initial d’achat, comme mesure coercitive.

Concernant la fiscalité, la CGEM recommande l’instauration d’incitations fiscales, comme celles d’un crédit impôt recherche et d’un crédit impôt investissement.

Enfin la CGEM exprime le vœu de disposer d'un code du travail plus flexible, accusant le code actuel d’être "un réel frein aux investisseurs marocains et étrangers".

Par ailleurs, Chakil El Alj a émis d'autres recommandations. Il s’agit notamment de rendre l’offre bancaire plus accessible et plus compétitive, de redynamiser le marché boursier, de faciliter l’accès au marché publics aux TPME, et d’accélérer l’introduction des amendements à la loi sur les délais de paiement.

Les périmètres du ministère de l’investissement

Répondant à une question sur les périmètres de son ministère, Mohcine Jazouli a expliqué que les missions relatives à la convergence reposaient sur trois dimensions.

La première étant "la verticalité des politiques publiques ; c’est-à-dire s’assurer qu’elles vont jusqu’au bout de leur réalisation, qu’elles sont efficaces et efficientes pour pouvoir faire les arbitrages les unes par rapport aux autres, au moment de la définition des budgets et de la préparation de la loi de Finances".

La deuxième dimension est horizontale, "car il y a le besoin de décloisonner, d’éviter de travailler en silos et qu’il y ait une vraie communication entre les différentes politiques publiques".

La troisième concerne la profondeur régionale. "On parle aujourd’hui de déconcentration et de décentralisation, mais il faut aussi qu’il y ait une certaine convergence et cohérence pour que les politiques publiques soient efficientes sur le terrain."

Mohcine Jazouli a également expliqué la différence entre le travail d’évaluation dont sera chargé son ministère et celui que conduira le HCP dans sa nouvelle version. D'après lui, le travail qui sera effectué au sein de son ministère s’apparentera à un audit interne, alors que le travail réalisé par le HCP équivaudra à un audit externe, qui va challenger le gouvernement.

Le ministre, qui exerce désormais la tutelle sur l’Agence marocaine de développement des investissements et des exportations (AMDIE), précise que cette dernière, qui était un outil de dynamisation de l’investissement axé sur le secteur industriel, s’ouvrira désormais à d’autres secteurs économiques.

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