AMO et retraite des médecins privés : le gouvernement propose 8 à 12 fois le SMIG comme base de cotisation

Le gouvernement a rencontré les médecins libéraux lundi 26 novembre dans le cadre de la mise en place de l’AMO et de la retraite des indépendants. Il a proposé de retenir un revenu forfaitaire de 8 fois le SMIG pour les généralistes et 12 fois le SMIG pour les spécialistes comme base de prélèvement des cotisations. Une contre-proposition des médecins est attendue dans les prochains jours. Mais au final, c’est l’Exécutif qui décidera.

AMO et retraite des médecins privés : le gouvernement propose 8 à 12 fois le SMIG comme base de cotisation

Le 29 novembre 2018 à 15h51

Modifié 11 avril 2021 à 2h50

Le gouvernement a rencontré les médecins libéraux lundi 26 novembre dans le cadre de la mise en place de l’AMO et de la retraite des indépendants. Il a proposé de retenir un revenu forfaitaire de 8 fois le SMIG pour les généralistes et 12 fois le SMIG pour les spécialistes comme base de prélèvement des cotisations. Une contre-proposition des médecins est attendue dans les prochains jours. Mais au final, c’est l’Exécutif qui décidera.

La mise en place de l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO) et de la retraite des travailleurs non salariés est en marche. L’adoption des lois 98.15 et 99.15 relatives à ces deux régimes a eu lieu en 2017, celle des décrets d’application fixant les taux de cotisation et d’autres aspects pratiques en septembre dernier.

Il manque encore les décrets spécifiques à chaque profession, groupe de professions ou sous-professions devant fixer l'organe représentant, les revenus forfaitaires servant de base de prélèvement des cotisations, les modalités d’identification et d’immatriculation des indépendants, de paiement des contributions et de versement des prestations. Des aspects qui doivent faire l’objet de concertations avec les représentants de chaque profession.

>>Lire aussi: AMO et retraite des indépendants: les détails des projets de décrets d’application

«En ce qui concerne le revenu forfaitaire, c’est le gouvernement qui va décider conformément à la loi. Mais compte tenu de l’importance de cette question, elle est discutée avec les professionnels dans le cadre des concertations. Il n’empêche qu’au final, le dernier mot reviendra à l’Exécutif», précise une source de l’administration qui a assisté à la première réunion de concertation organisée le lundi 26 novembre.

Cette première réunion s’est tenue avec les représentants des médecins généralistes et spécialistes du secteur libéral, une population comprise entre 11.000 et 12.000 personnes. Il s’agit de la première profession avec laquelle le gouvernement entame les travaux de mise en place des deux régimes de protection sociale.

Selon notre source, elle a porté principalement sur la fixation du revenu forfaitaire sur la base duquel les médecins cotiseront. «Les autres points, notamment l’identification des médecins, leur immatriculation et les modalités de paiement des cotisations n’ont quasiment pas été abordés mais ils ne sont pas problématiques, la profession étant structurée et bien représentée. Ils peuvent être fixés rapidement lorsque la question du revenu forfaitaire est réglée», précise-t-elle.

On comprend par cette réponse qu’aucun accord n’a été trouvé à l’issue de cette réunion. «C’est normal, on ne s’attendait pas à un accord dès le premier jour».

Le gouvernement a proposé de retenir un revenu forfaitaire de 8 fois le SMIG pour les médecins généralistes et de 12 fois le SMIG pour les médecins spécialistes. Cela donnerait les cotisations suivantes :

- Pour les généralistes : une cotisation mensuelle d’environ 1.300 DH pour l’assurance maladie (20.500 DH x 6,37%) et de 2.000 DH pour la retraite (taux de 10%).

- Pour les spécialistes : une cotisation mensuelle d’environ 1.960 DH pour l’assurance maladie (30.800 DH x 6,37%) et de 3.080 DH pour la retraite (taux de 10%).

Cette proposition n’a pas été accueillie favorablement par la profession. Selon notre source, les médecins libéraux affirment ne pas gagner autant d’argent et estiment que le modèle retenu par l’Exécutif est décalé de la réalité.

Les médecins vont formuler une contre-proposition dans les prochains jours. Elle sera discutée lors d’une deuxième réunion prévue entre les professionnels et le gouvernement. Ce dernier se dit prêt à faire un effort pour faire converger les positions.

Contacté par Médias24, Badreddine Dassouli, président du Syndicat national des médecins du secteur libéral est resté injoignable.

Le Maroc s'est inspiré du modèle tunisien

Quel modèle le gouvernement a-t-il retenu pour fixer les revenus forfaitaires des médecins ?

Selon notre source, l’Exécutif s’est inspiré de l’expérience de la Tunisie qui a identifié toutes les professions non salariées et fixé pour chacune un revenu forfaitaire suivant des critères définis (nombre d’employés travaillant chez l’indépendant, revenu perçu par une profession dans le secteur public…).

Le gouvernement a opté pour des revenus forfaitaires au lieu des revenus effectivement encaissés en l’absence d’un système déclaratif fiable au Maroc (tous les indépendants ne déclarent pas leurs revenus au fisc et ceux qui le font ne déclarent pas forcément leurs revenus réels) et pour éviter d’instaurer un système de contrôle compliqué et coûteux. «Plusieurs départements chapeautés par le chef du gouvernement ont procédé à l’identification des professions et groupes de professions et élaboré des propositions de revenus forfaitaires en s’inspirant du système tunisien».

>>Lire aussi: Impôts: Les professions libérales dans le viseur de la DGI

Pour fixer les revenus forfaitaires de médecins libéraux, il a retenu les salaires réels perçus par les médecins du secteur public qui sont au mieux égaux à ceux du secteur libéral. Selon les données sur la fonction publique de 2014 (base retenue), un médecin généraliste perçoit en moyenne 18.000 DH bruts par mois pendant sa carrière. «C’est l’équivalent de 7 fois le SMIG, nous avons retenu 8 fois le SMIG pour le privé. En Tunisie c’est 5 fois le SMIG mais les salaires dans ce pays sont beaucoup plus bas qu’au Maroc», précise notre source.

Celle-ci répond à la profession qui dit ne pas gagner autant d’argent: «Les médecins du privé assurent l’essentiel des prestations de soins au Maroc. Les dépenses de la CNSS et de la CNOPS vont à hauteur de 95% au secteur privé de la santé».

Certes, un médecin libéral en début de carrière peut ne pas percevoir ce niveau de revenu. Mais il faut savoir que le revenu forfaitaire est fixe. Autrement dit, la cotisation peut peser dans le revenu en début de carrière mais son poids baissera au fil des années.

Est-ce inéquitable sachant que les salariés cotisent sur la base d’une assiette de cotisation plafonnée à 6.000 DH ?

«On aurait pu se dire que le coût moyen de la santé au Maroc est par exemple de 1.000 DH par mois, et fixer ce niveau de cotisation pour tout le monde. Or, on n’est pas dans un système commercial où l’on achète un produit à un prix qui correspond à sa valeur ; on est dans un système d’assurance sociale basé sur la solidarité entre riches et pauvres», martèle notre source.

Pour elle, malgré son coût, ce système de protection sociale est avantageux pour les médecins. «Certes pour les petites maladies ils ont l’habitude de s’auto-soigner et consomment des médicaments offerts par les laboratoires. Mais pour les grandes maladies coûteuses, ils ont besoin d’une couverture comme celle qu’offre la CNSS. En ce qui concerne la retraite, ils bénéficieront de toutes leurs cotisations revalorisées. Et ce contrairement aux salariés dont l’assiette de cotisation est plafonnée et leur pension également».

Les discussions avec les indépendants seront difficiles

Quoi qu’il en soit, le gouvernement est conscient que les discussions seront difficiles avec toutes les professions et pas seulement les médecins. «Les indépendants ne sont pas habitués à se voir prélever une somme de leurs revenus».

Une fois cette question du revenu forfaitaire tranchée avec les médecins, les discussions porteront sur les autres aspects de la mise en œuvre de la couverture sociale. Notamment l’organe qui jouera le rôle d’intermédiaire entre les professionnels et la CNSS pour l’identification, les contrôles, les entrées et sorties de la profession, les changements de statuts… « Il y a l’Ordre national des médecins mais il n’est pas acquis que c’est lui qui jouera ce rôle», précise notre source.

Les discussions avec les médecins se poursuivront parallèlement à celles programmées avec d’autres professions. Des réunions avec les pharmaciens et les biologistes sont prévues à partir de la semaine prochaine. Suivront les transporteurs, les artisans… «Il n’y a pas de préférence ou de population privilégiée. C’est une question de calendrier».

Pour certaines catégories qui n’ont pas d’équivalent dans le secteur public, le gouvernement utilisera l’écart de revenu qu’il y a dans le modèle tunisien entre ces catégories et les professions organisées.

Mais hormis le revenu, d’autres aspects peuvent poser des problèmes : Qui va représenter ces catégories d’indépendants ? Comment les recenser ? Comment collecter leurs cotisations ? «Si le système n’est pas bien conçu et verrouillé, on risque de voir adhérer au régime uniquement les indépendants qui ont besoin de la couverture alors que sa pérennité nécessite l’adhésion de tous», conclut-on.

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