Entretien. Le très discret groupe Balima sort de son silence

EXCLUSIF. Près d’un siècle après sa création, le groupe Balima fait sa première sortie médiatique. Dans cet entretien à bâtons rompus avec Médias24, truffé de références financières, économiques, juridiques, historiques et même anecdotiques, sa présidente Jacqueline Mathias revient sur l’itinéraire de la société créée par son père. On y apprend, entre autres, que ce groupe, très discret et néanmoins coté en bourse depuis 1946, ambitionne de faire de l'avenue Mohammed V de Rabat la plus belle du Maroc.

Entretien. Le très discret groupe Balima sort de son silence

Le 18 janvier 2019 à 11h06

Modifié 18 janvier 2019 à 11h06

EXCLUSIF. Près d’un siècle après sa création, le groupe Balima fait sa première sortie médiatique. Dans cet entretien à bâtons rompus avec Médias24, truffé de références financières, économiques, juridiques, historiques et même anecdotiques, sa présidente Jacqueline Mathias revient sur l’itinéraire de la société créée par son père. On y apprend, entre autres, que ce groupe, très discret et néanmoins coté en bourse depuis 1946, ambitionne de faire de l'avenue Mohammed V de Rabat la plus belle du Maroc.

Médias24 : Récemment, 391.390 titres Balima ont été échangés pour un montant de 40 MDH. Le groupe BMCE a procédé à un reclassement en transférant 22,3% d’actions de SFCM à Argan Invest...

Jacqueline Mathias : Oui, nous aurions cependant apprécié qu’ils mettent ce paquet d’actions sur le marché.

-Vous les auriez rachetées ?

-En fait, nous aurions souhaité que des actionnaires vendent leurs titres pour animer le marché.

-Comment expliquer que votre action soit si peu liquide ?

-Tout simplement parce que les détenteurs des actions Balima préfèrent garder leurs titres qui sont des valeurs sûres et refuges.

-A l’instar de l’or...

-En fait, je pense qu’ils considèrent ce titre comme une obligation. Pour eux, c’est du solide parce que c’est de la pierre et in fine, c’est le cœur de Rabat qu’ils possèdent.

Parmi nos actionnaires, nous avons des descendants des fondateurs du groupe, de ceux qui ont été les premiers en 1928 à mettre de l’argent pour créer la société Balima.

-En près d’un siècle, ils ne se sont donc jamais séparés de leur paquet d’actions ?

-Non mais je ne vous cache pas qu’on espère toujours que quelqu’un finira par vendre.

Pour essayer de rendre le titre plus liquide, nous avons effectué deux opérations de split c’est-à-dire que nous avons divisé la valeur de chaque action par quatre ce qui a multiplié le nombre d’actions par quatre.

Une deuxième fois, nous l’avons divisé par dix en espérant qu’à ce moment, les gens seraient enclins à vendre ou à racheter mais c'est resté sans effet concret.

-De combien d’actions dispose votre famille Mathias ?

-29,57% du capital de Balima.

-A quand remonte la dernière grosse vente avant l’opération de reclassement de la BMCE ?

-A environ une vingtaine d’années.

-Vous ne comptez pas vendre une partie de vos propres actions ?

-Sûrement pas, je souhaite d’ailleurs que le groupe Balima reste familial avec mes fils qui prendront la relève. Il faut rappeler que cette société a été créée par mon père avec deux autres investisseurs.

-D’où vient l’appellation Balima ?

-Les fondateurs étaient Bardi, Liorel et Mathias. Le nom Balima vient du début de leurs noms de famille à savoir BA pour Bardi, LI pour Liorel et MA pour Mathias.

-La légende dit que votre père est arrivé d’Algérie sans capital de départ.

-Pour être précis, il est venu de France via l’Algérie plein d’enthousiasme, de courage et servi par une grande intelligence.

Louis Mathias était un visionnaire animé d’une volonté de créer et de bâtir l’avenir.

-C’était un architecte ?

-Pas du tout, il avait pour seul bagage son baccalauréat et s’est lancé petit à petit.

Avant Balima, il a commencé à construire des petites villas dans le quartier de l’Agdal à Rabat.

-C’étaient ses premiers chantiers...

-Exact. A cette époque, dans les années 20, où l’eau n’était pas encore courante dans toutes les habitations, il avait d’ailleurs imaginé d’équiper ces villas de ballons de retenue d’eau sur les toits pour la réchauffer.

-C’était novateur à l’époque...

-Personne n’avait jamais pensé à installer ce procédé très pratique surtout qu’en plus, il y avait beaucoup de coupures d’eau à cette époque.

-Ces villas existent toujours ?

-Elles ont toutes été rasées et remplacées par des immeubles.

-Le grand public connaît surtout votre groupe à travers l’hôtel Balima de Rabat mais peu de gens savent qu’il a eu un prédécesseur éponyme à Ifrane...

-En effet, la construction de cet hôtel qui s’appelait également Balima a précédé celui de la capitale.

Avant de l’édifier, mon père s’était rendu dans la région d’Ifrane en 1928.

-Pourquoi Ifrane ?

-Le résident général de l’époque du protectorat l’avait sollicité pour monter une station de montagne réservée aux amateurs de ski et de grand air.

Mon père s’est donc rendu en voiture avec Erik Labonne, munis de laissez-passer, à travers les pistes dans cette région montagneuse.

C’est ainsi qu’ils se sont arrêtés dans un site magnifique qui verra la construction du premier hôtel Balima.

C’est d’ailleurs au résident que l’on doit les toits pointus en tuile qui font la touche d’Ifrane à l’instar de ce qui se fait dans les Alpes ou les Pyrénées françaises.

Pour concrétiser cet ambitieux projet, la société a acquis un grand terrain sur la montagne dont il a fallu couper une partie pour édifier un établissement hôtelier de 100 chambres.

-Combien d’années de travaux dans cette zone montagneuse et accidentée ?

-A peu près deux années avant que l’hôtel ouvre ses portes au public en 1930.

Dans cet établissement de 100 chambres, il y avait une grande terrasse, un jardin d’enfants avec des manèges et des balançoires, un orchestre, une salle de bal, des après-midi déguisées, des excursions … Cet hôtel a donc été un précurseur en matière de loisirs pour ses clients.

-C’était le tout premier hôtel de luxe du Maroc ?

-Je ne sais pas s’il est antérieur à La Mamounia de Marrakech mais c’était en tout cas, à l'époque, un des plus luxueux de l’histoire de l’hôtellerie marocaine.

Outre une clientèle marocaine qui appréciait l’air pur de la région d’Ifrane, une autre partie de sa clientèle venait d’Algérie.

-L’aventure a duré combien d’années ?

-Il y a d’abord eu une coupure pendant la deuxième guerre mondiale. L’hôtel a été loué par l’armée américaine qui en a fait un camp de repos pour ses soldats et officiers entre 1941 et 1943.

A la libération en 1945, il a rouvert ses portes au grand public.

Mon père s’en occupait personnellement car cela le passionnait, il y a d’ailleurs une fibre hôtelière dans la famille que mon fils cadet perpétue.

A ce propos, l’histoire retiendra que quand l’hôtel a ouvert ses portes, SM Mohammed V est venu le visiter, a trouvé l’endroit superbe et a décidé de construire un palais sur la montagne en face de l’hôtel.

-Pourquoi ce fleuron de l’hôtellerie marocaine a-t-il fermé définitivement ses portes ?

-Après la guerre, les affaires ont repris pendant quelques années mais mon père ne rajeunissait pas et avait donc moins d’enthousiasme pour s’en occuper personnellement.

Avec le développement des transports aériens, il y a eu, petit à petit, une désaffection de la clientèle au profit de l’Europe qui a conduit à la fermeture de l’hôtel.

Au final, l’établissement est donc resté fermé très longtemps à partir du milieu des années 1960.

-Qu’est-il devenu ?

-Il a été revendu aux domaines puis complètement détruit.

-Ce qui est étonnant est que votre père a construit l’hôtel Balima de Rabat presque en même temps...

-Effectivement, le premier d’Ifrane a ouvert ses portes en 1930 et celui de Rabat en 1932.

Cela a été rendu possible par le fait que mon père travaillait énormément et n’avait d’ailleurs pas besoin de plus de trois heures de sommeil.

Lors de la construction de l’hôtel d’Ifrane, il partait de Rabat avec son architecte à 4 heures du matin pour surveiller le chantier et revenait tard le soir.

En outre, à chaque fois qu’il construisait un immeuble, il l’hypothéquait pour en édifier un nouveau.

-Hormis ces deux hôtels, y a-t-il eu d’autres expériences hôtelières du groupe Balima ?

-Non aucune.

-Balima est coté en bourse depuis 1946 mais a été fondée en 1928. C’est la première interview que vous accordez à un média marocain ou étranger, pourquoi cette discrétion depuis près d’un siècle ?

-C’est sûrement de famille car mon père, fondateur du groupe, détestait la publicité.

-Pour les habitants de Rabat, le groupe Balima se limite à l’hôtel éponyme et à des immeubles dans la capitale, êtes-vous présent dans d’autres villes du Maroc ?

-Non, la grande majorité de nos actifs immobiliers se trouvent à Rabat. Ifrane avait été un coup de cœur et un pari paternel de créer quelque chose de nouveau et novateur.

-Pourquoi n’a-t-il pas investi à Marrakech où l’immobilier a littéralement explosé ?

-Tout simplement parce que dans les années 20, Rabat représentait le cœur des investissements immobiliers.

Il aurait pu également investir à Casablanca mais le nombre très important d’immeubles qu’il a construits en une quinzaine d’années ne lui a pas laissé de temps pour aller ailleurs.

N’oubliez pas qu’entre 1923 et 1940, mon père a fait partie de ceux qui ont dessiné et érigé le centre-ville de la capitale qui n’était constitué que de terrains vagues.

Avant de s’attaquer à l’avenue Mohammed V, il a construit des immeubles, rue de la Mamounia, proches de la vieille médina de Rabat.

Cette zone a été la première qui a vu l’éclosion des immeubles modernes construits par Louis Mathias.

-On dit que le Parlement a été construit par votre père et ses associés ?

-Pas par lui car il n’était pas entrepreneur.

C’est son associé André Liorel qui était venu de sa Normandie, d’abord en Espagne puis à Tanger, et enfin à Rabat.

Ce monsieur qui est devenu très ami avec mon père était d’ailleurs mon parrain.

C’est lui qui a construit la Cour d’appel de Rabat qui deviendra ensuite le Parlement.

Le Parlement actuel a d’ailleurs gardé la même architecture extérieure que l’ancien palais de justice.

-Sur cette avenue, où se trouve le Parlement, combien d’immeubles possède le groupe Balima ?

-Au total à Rabat, nous en avons 25.

Sur l’avenue, les immeubles Balima vont de la gare jusqu’à la Banque du Maroc.

Nous en possédons également dans plusieurs quartiers de la capitale

-Ce ne sont pas des petits immeubles mais plutôt de grands ensembles architecturaux...

-C’est exact. Malgré les tremblements de terre qu’a connu Rabat, ces immeubles construits en pierre de taille n’ont subi aucune fissure.

-Y-a-t-il une touche architecturale Balima?

-Nos immeubles sont d’une architecture pure des années 30 avec des façades très régulières.

Le Maroc a été un véritable laboratoire pour les architectes du monde entier, surtout Casablanca, les architectes de cette époque se sont vraiment lâchés tout en s’adaptant aux spécificités du Maroc.

Il n’y a par exemple qu’à voir les zelliges dans les cages des escaliers de nos immeubles.

-Combien d’architectes ont accompagné votre père ?

-Il n’a pas beaucoup varié car il en a eu au total deux qui ont fait l’essentiel du travail.

Les plus anciens sont François Robert et l’architecte Planque qui sont très connus.

-Aujourd’hui, Balima n’est toujours présent qu’à Rabat ?

-Pour la grande majorité oui mais nous avons aussi un petit terrain à Casablanca et un grand à Témara.

-Tous vos actifs sont loués, pourquoi ne pas vous être lancés dans la promotion immobilière ?

-C’est un tout autre métier mais nous le faisons épisodiquement. Le cœur de métier de Balima est de construire et de louer dans l’esprit de durer.

On l’a fait au quartier de l’Agdal dans la rue du 16 novembre où Balima a construit deux immeubles de haut de gamme.

Un nous appartient toujours et l’autre a été revendu par appartement parce que cela correspondait à une période de flambée des prix de l’immobilier.

-La rue du 16 novembre est en effet la plus chère de Rabat (30.000 DH le mètre-carré)...

-Exact et c’est pourquoi nous avions acheté des villas que nous avons rasées pour construire des immeubles de haut standing.

-Vous présidez le groupe depuis 38 ans mais le chiffre d’affaires et le résultat n’évoluent pas beaucoup (44 MDH et 10 MDH en 2017), quelle est votre explication ?

-Simplement parce que depuis quelques années, le marché de l’immobilier stagne après une flambée des prix.

-Oui mais votre cœur de métier est la location et pas la vente où la bulle immobilière a explosé...

-C’est exact mais la location est régie par une loi récente qui prévoit pour les loyers d’habitation une hausse tous les 3 ans de 8% et pour les baux commerciaux et professionnels de 10%.

Non seulement le rythme est lent mais, en plus avant d’obtenir d’un locataire une augmentation pourtant légale, c’est une véritable bataille qui est loin d’être gagnée à l’avance.

-Justement, est-il vrai que vous avez encore des grands appartements loués à des prix dérisoires ?

-C’est malheureusement juste.

Nous avons en effet des appartements de plus de 100 mètres carrés loués à moins de 1.000 dirhams par mois à des personnes ou leurs descendants qui y habitent depuis des décennies.

-Qu’en est-il des mauvais locataires qui ne payent pas leurs loyers ?

-Ce cas de figure est très difficile à gérer car il nécessite des procédures judiciaires de plusieurs années.

Malgré le fait que la loi soit de notre côté, dans la réalité, nous avons beaucoup de mal à expulser des gens qui parfois cumulent 20 ans d’impayés de loyers.

-Que faut-il penser de l’arrivée de la société Immorente Invest que l'on présente comme votre principal concurrent ?

-Ce ne sont pas des concurrents car nous ne faisons pas le même métier et ne jouons pas dans la même cour.

De plus, Immorente Invest est adossée à une banque et leurs objectifs et leur politique diffèrent des nôtres.

Ceci dit, ce sont des gens qui réussiront très bien dans leur créneau et je leur souhaite bonne chance.

-Depuis dix ans, vous avez restructuré votre parc immobilier, comment se ventilent vos baux ?

-Sur 500 contrats, nous avons des baux professionnels (avocats, médecins, dentistes, notaires, consultants …) qui représentent 17% (soit 85) du total des baux et 11% du chiffre d’affaires.

Les baux d’habitation sont de 32% du total (soit 160) et ne représentent que 12% du CA.

Les plus nombreux sont les baux commerciaux (bureaux, boutiques, commerces…). Ils constituent 51% du total des baux et 77% du chiffre d’affaires.

-Vous vous orientez donc de plus en plus vers le créneau locatif commercial ?

-Depuis quelques années, dès qu’un local qui s'y prête se libère, nous préférons en effet le louer pour un usage commercial ou professionnel.

-Quelle est la différence avec un bail d’habitation ?

-En signant un bail commercial, le locataire accède à la propriété commerciale au bout de 2 ans.

Après cette période, il a créé dans le local loué, un fonds de commerce dont fait partie le droit au bail.

Cela veut dire qu’il peut le vendre à une même activité, par exemple un boulanger à un boulanger.

-Vous ne pouvez pas vous y opposer ?

-Non car la loi lui permet de le faire sans aviser le propriétaire et rédiger un nouveau bail de location.

A contrario, s’il veut vendre son fonds de commerce à un acquéreur exerçant une activité différente, l’accord du propriétaire est nécessaire et entraîne l’établissement d’un nouveau bail.

La propriété commerciale ne joue plus car elle impose de rester dans le même secteur d’activité.

Ainsi, si l’activité de l’acquéreur éventuel n’est pas compatible avec ce que nous souhaitons pour le standing de l’immeuble, nous pouvons nous y opposer.

-Comment se débarrasser des mauvais payeurs ?

-Les procédures d’expulsion des mauvais payeurs sont très longues car les avocats ont l’art de faire traîner le processus judiciaire.

Il est compliqué d’expulser des commerçants ou professionnels qui ne s’acquittent pas de leur loyer mais c’est encore plus difficile pour les locataires d’habitation.

Si la justice répugne à expulser des familles, nous ne sommes pas des bourreaux pour autant, car nous avons des locataires depuis des décennies qui payent des petits loyers, et que nous n’augmentons pas eu égard à leur faible revenu.

-Combien avez-vous de dossiers en justice ?

-Il y a deux types de dossiers, à savoir pour non-paiement de loyer ou refus d’augmentation.

Ce ne sont pas les plus démunis qui refusent de payer. Au 31 décembre dernier, nous avions 64 dossiers en contentieux qui représentent 4,1 millions de dirhams d’impayés dont certains depuis plus de vingt ans.

-Combien de locaux de votre parc immobilier sont vides ?

-Au total, cela représente 3% de notre parc soit environ une quinzaine de locaux.

Cela nous a d’ailleurs permis de nous lancer dans un nouveau créneau locatif d’appartements meublés.

-Dans le cadre d’Airbnb ou directement ?

-C’est cela, directement. Dès que des appartements se libèrent, nous les restaurons et les équipons de meubles et de commodités tout confort, y compris d’une connexion internet.

-C’est donc un nouveau créneau ?

-Nous l’avons démarré au printemps dernier avec une dizaine d’appartements et nous allons monter en puissance. Je tiens à préciser que nous payons la TVA sur ces locations.

-En dehors de l’hôtel Balima, quels sont les autres bâtiments emblématiques du groupe ?

-Tous les immeubles de l’avenue Mohammed V sont emblématiques car ils sont situés sur la plus belle avenue de Rabat.

-Disposez-vous d’autres réserves foncières ?

-A Casablanca et à Témara.

-Pour quel usage ?

-A Casa, nous avons racheté une villa dont la zone est passée en zone immeuble et à Témara, nous avons acquis un grand terrain que nous allons peut-être lotir en villas.

-Vous procédez donc au coup par coup pour renforcer votre parc, quels sont les chantiers actuels ?

-Le plus important est celui de l’hôtel Balima de Rabat qui va demander un investissement conséquent.

-On dit que vous allez profiter de sa rénovation pour faire du centre-ville les Champs-Elysées de Rabat ?

-De la gare à la poste, l’avenue Mohammed V est non seulement la plus belle de la capitale mais peut-être aussi du Maroc car elle n’a pas son équivalent ailleurs.

Faut-il rappeler que les grands défilés et cortèges royaux avec les Chefs d’Etat étrangers l’empruntent systématiquement. A partir de là, elle représente déjà à l’origine les Champs-Elysées de la capitale.

-Cela ne l’a pas empêchée de se paupériser avec des marchands ambulants et de la saleté...

-Vous avez entièrement raison mais la société a toujours eu pour priorité de bien entretenir ses façades d’immeuble.

-C’est aussi dans votre intérêt...

-Evidemment. Afin de mettre fin à cette dégradation, nous avons commencé par racheter le fonds de commerce de l’ancien cinéma Colisée.

Cette très belle salle, quasi-mythique pour les Rbatis, ne passait plus de bons films et était devenue au fil des années un endroit très malfamé.

Les jeunes venaient boire de l’alcool et fumer dans cette salle et tout ce beau monde se répandait ensuite dans les immeubles environnants ou sur l’avenue avec les nuisances que vous pouvez imaginer.

Etant propriétaire des murs, j’ai donc contacté le locataire pour racheter son fonds de commerce dans le but d’assainir l’avenue.

-Sachant que la salle était fermée pendant très longtemps, vous avez donc perdu de l’argent ?

-Oui mais cela en valait la peine pour conserver le standing de l’avenue.

-Vous l’avez ensuite louée à des conditions favorables à un exploitant de salles. 1.000 mètres carrés au centre-ville à 30.000 dirhams, c’est du jamais vu...

-Peut-être, mais il faut rappeler que l’endroit est resté fermé entre 2001 et 2017.

-Personne n’en voulait ?

-Non. Jusqu’à ce que Ciné Atlas nous propose d’en faire un complexe cinématographique. C’est devenu un très bel établissement qui a demandé un investissement important.

-Le résultat est en effet indéniablement à la hauteur...

-C’est un bienfait pour toute l’avenue et pour la ville.

Tout le monde en profite autour car l’ouverture d’un cinéma attire de nouveaux consommateurs qui font le bonheur des commerces et des restaurants aux alentours.

On peut donc dire que ce multiplex a ranimé l’activité commerciale de l’avenue.

-Vous aviez fait la même chose avec la brasserie parisienne « Le grand comptoir » ?

-Nous voulions donner un coup d’éclat et de lustre au centre-ville car l’ancien café « Les Ambassadeurs » s’était paupérisé et avait dévalorisé l’avenue Mohammed V.

-Etes-vous prioritaire pour la reprise du fonds de commerce ?

-Légalement non mais quand c’est possible. Nous faisons en sorte de remplacer les anciens commerces par des enseignes de meilleure facture.

Quand les anciens locataires vendent leur fonds de commerce à des branches d’activités différentes, nous sommes intraitables pour privilégier la qualité.

Par cette politique d’écrémage, nous essayons simplement de revenir aux premiers standards de cette avenue qui était dans le passé une des plus belles vitrines du Royaume.

-Vous essayez d’attirer des boutiques de luxe ?

-Oui et la qualité de notre zone de chalandise s’est beaucoup améliorée.

-Avez-vous un budget annuel pour rénover l’avenue Mohammed V ?

-Nous avons un budget d’entretien de nos façades mais si un commerçant locataire refuse d’entretenir ou de mettre à niveau son local, on ne peut pas le forcer.

-Vous avez déboursé 20 MDH pour récupérer l’hôtel Balima qui est le fleuron du centre-ville ?

-Avant d’en arriver là, la bataille judiciaire a duré cinq longues années.

-Combien comptez-vous débourser pour le rénover ?

-Nous avons prévu une enveloppe de 50 MDH et espérons ne pas dépasser ce plafond.

-Quel est le but, en faire un établissement de référence ?

-Il n’aura, en effet, plus rien à voir avec l’ancien hôtel.

En fait, nous voulons qu’il retrouve le lustre de ses débuts pour redevenir une des références hôtelières de la ville de Rabat.

L’objectif exact est d’en faire un boutique-hôtel de quatre étoiles, un hôtel de charme.

-Pourquoi pas cinq étoiles sachant que l’occasion ne se représentera plus jamais ?

-Ce n’est pas possible parce que l’espace ne le permet pas.

La surface n’étant pas très grande, nous ne pouvons pas prétendre à ce classement.

-Même avec 100 MDH d’investissements pour le rénover ?

-Non seulement l’infrastructure et la superficie existantes ne le permettent pas, mais en plus, il faut quand même que l’affaire soit rentable.

-Actuellement, combien y-a-t-il de chambres par palier ?

-Au total, il y en a 70 sur 5 étages soit 14 par palier. Nous avons prévu d’en supprimer plusieurs pour édifier un deuxième escalier et être dans les nouvelles normes de sécurité hôtelière.

Cela ne nous empêchera pas de faire un très beau quatre étoiles sachant que l’ancien s’était dégradé à 3 étoiles.

-Ses travaux sont à l’arrêt depuis un long moment, qu’est ce qui coince ?

-Pour bien rénover et s’inscrire dans les nouvelles normes de sécurité très contraignantes, il faut du temps.

-Encore combien de temps avant qu’il n’ouvre ses portes à nouveau ?

-Au maximum deux ans.

-Qui va le gérer ?

-Un opérateur.

-Spécialisé ?

-De préférence oui. Nous avons déjà reçu des offres mais nous n’avons pas encore arrêté notre choix.

-L’hôtel s’appellera toujours Balima ?

-C’est une condition sine qua none.

-Si une grande chaîne propose de l’appeler par exemple Hilton-Balima ?

-Cela dépendra du prestige de la chaîne intéressée par la gestion de l’hôtel.

Je ne l’exclus pas, mais le moins possible sera le mieux même si encore une fois, garder notre nom est une obligation.

-Que pensez-vous de l’état sauvage de l’avenue Mohammed V ?

-Entre le stationnement sauvage des motos et des vélos sans parler des ferrachas (vendeurs ambulants) sur les trottoirs, son état ne cesse de se dégrader et nuit à la réputation du centre-ville.

-Tous les commerçants pointent du doigt la responsabilité des autorités municipales 

-Tout ce que je peux dire, c’est qu’il est vraiment dommage de laisser ces gens s’installer alors qu’ils ne payent aucun impôt et que cela nuit fortement aux commerces et habitants environnants.

-Pour conclure, Balima est une affaire qui marche et qui restera familiale ?

-Absolument, j’espère que Balima restera dans la famille grâce à l’engagement de mes trois fils.

Sachant qu’elle a été créée il y a près d’un siècle, le groupe devrait toujours être là au 22ème siècle…

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