Malgré l’enseignement hybride, les élèves à besoins spécifiques peinent toujours

Les élèves ayant des troubles de l’apprentissage peinent à rattraper le retard accumulé pendant les trois mois d’enseignement à distance. La reprise partielle de l’enseignement en présentiel ne suffira pas à pallier leurs lacunes.

Malgré l’enseignement hybride, les élèves à besoins spécifiques peinent toujours

Le 16 novembre 2020 à 16h10

Modifié 11 avril 2021 à 2h49

Les élèves ayant des troubles de l’apprentissage peinent à rattraper le retard accumulé pendant les trois mois d’enseignement à distance. La reprise partielle de l’enseignement en présentiel ne suffira pas à pallier leurs lacunes.

L’enseignement à distance a été éprouvant pour les élèves, tout âge et niveau confondus, mais certainement plus encore pour les enfants à besoins spécifiques, notamment les enfants dits ''dys'', ceux ayant des troubles de la concentration ou des troubles du déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH). La mise en place du modèle hybride a certes amélioré leur situation, mais celle-ci n’en reste pas moins toujours compliquée.

Dans la grande famille des ''dys'', figurent la dyslexie, un trouble de l’apprentissage de la lecture ; la dysphasie, un trouble du langage oral ; la dysorthographie, un trouble de l’acquisition et de l’automatisation de l’orthographe ; la dysgraphie, un trouble de l’acquisition et de l’automatisation du geste graphique et la dyspraxie, un trouble de la conception, de la programmation et de la réalisation des gestes.

Des enfants livrés à eux-mêmes...

''Ce sont des enfants qui ont énormément besoin d’être cadrés et suivis, d’avoir l’enseignante ou l’auxiliaire de vie scolaire à leurs côtés. En distanciel, surtout lorsque les parents travaillent, c’est juste impossible pour eux de travailler en autonomie'', explique Dr Naoual Ajoub, pédopsychiatre jointe par Médias24. Selon elle, le modèle hybride, moitié présentiel, moitié distanciel, n’a permis de rattraper ''que de moitié'' le retard accumulé pendant le confinement et les trois mois d’enseignement à distance.

Contactée par Médias24, Mongia Hajri, neuropsychologue et psychologue clinicienne, fait état d’un avis plus tranché : ''Ce qui est perdu est perdu.'' Bien sûr, le modèle hybride permet de reprendre la main sur ces enfants, facilement sujets au décrochage scolaire, mais ce modèle n’est pas suffisant, estime-t-elle. ''En termes d’acquisition scolaire, le doute persiste. Ces enfants ont-ils acquis toutes les connaissances qu’ils devaient acquérir ? Trois ou quatre heures de présentiel par jour ne peuvent pas suffire à rattraper ce qui a été perdu, d’autant que certains parents n’ont pas du tout travaillé avec leurs enfants pendant le confinement ; ils ne les ont pas du tout suivis'', observe-t-elle.

Dr Naoual Ajoub estime qu’il aurait été plus pertinent que ces enfants à besoins spécifiques soient pris dans les deux groupes, en présentiel et en distanciel : ''En présentiel uniquement, le temps n’est pas suffisant pour eux. Il est fréquent qu’à la fin du cours, l’enseignante prenne du temps pour réexpliquer une leçon, revoir certains points avec ces élèves, justement parce que le temps alloué aux cours n’est pas suffisant en temps normal pour ces enfants.''

...et des parents souvent impuissants pour les aider

A distance également, les élèves qui ont des troubles de la concentration ou d’hyperactivité se laissent facilement tenter par les jeux en ligne et les plateformes de vidéos. ''Si l’enfant n’a pas un adulte à ses côtés lorsqu’il est en distanciel, c’est mission impossible pour lui'', insiste Dr Naoual Ajoub.

Des distractions qui agacent parents et enseignants, dont certains peuvent devenir ''maltraitants par négligence'', abonde Mongia Hajri : ''Les enseignants sont tenus par un timing. Par conséquent, ils prêtent plus attention au temps qui passe qu’à la qualité de l’enseignement qui est transmis. Un enfant perdu, tant pis pour lui.'' Les enfants qui ont des troubles ''dys'', par exemple, sont donc livrés à eux-mêmes lorsqu’ils sont à la maison, et le moindre exercice de lecture ou d’écriture peut très vite devenir compliqué. ''L’enseignant n’est pas là pour réexpliquer, voir ce que l’enfant fait. Ces enfants, qui sont déjà peu autonomes, le sont encore moins sur le temps consacré au distanciel'', souligne encore Mongia Hajri.

Autre exemple : les enfants dysgraphiques, qui présentent des troubles de la motricité fine notamment. L’ordinateur peut être un palliatif, mais encore faut-il que l’élève soit accompagné dans l’utilisation du clavier. ''On ne peut pas lui demander d’utiliser un clavier sans l’avoir préalablement formé, sans quoi il est complètement perdu. Ce sont également des enfants qui ne doivent pas être mis en double tâche, c’est-à-dire faire deux choses en même temps. A distance, s’ils ne sont pas accompagnés, ils n’ont aucun moyen de s’organiser et de travailler par eux-mêmes.''

Dépassés par les difficultés de leurs enfants, certains parents ont pris le taureau par les cornes : dans certains couples, l’un des deux parents – très souvent la mère – a mis en retrait ses engagements professionnels pour se consacrer entièrement à la prise en charge de leur enfant ''dys'' ou ayant des TDAH. C’est ce que constate Mongia Hajri. ''Beaucoup de parents ont arrêté la prise en charge de leurs enfants pendant le confinement, notamment la rééducation psychomotricienne, orthophonique et neuropsychologique, pourtant indispensable dans le cas de certains troubles'', dit-elle.

Le retour partiel de l’enseignement en présentiel leur a donné un aperçu de l’impact de l’interruption de cette prise en charge. ''Certains parents ont pensé que les difficultés de concentration de leurs enfants étaient liées à des chamailleries entre frères et sœurs ou à un contexte familial pesant du fait du confinement. En fait, ils ne voyaient pas que leurs enfants souffraient de réels troubles de l’apprentissage ou de la concentration'', conclut Mongia Hajri.

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