Seuls 10% des transferts des MRE sont destinés à l'investissement (Benchaâboun)

Comment faire participer les Marocains du monde à l’effort national de relance économique. C’était le sujet d’un débat organisé par la CGEM où ont été invités les ministres des Finances et de l’Industrie ainsi que la ministre déléguée chargée des MRE. Aux côtés du président de la CGEM, ils ont répondu à toutes les questions relatives à la problématique de l’investissement des Marocains du monde dans leur pays d’origine, des opportunités que présente le Maroc et de la manière de les accompagner et de les impliquer dans l’effort de relance économique du pays.

Seuls 10% des transferts des MRE sont destinés à l'investissement (Benchaâboun)

Le 16 février 2021 à 19h46

Modifié 11 avril 2021 à 2h50

Comment faire participer les Marocains du monde à l’effort national de relance économique. C’était le sujet d’un débat organisé par la CGEM où ont été invités les ministres des Finances et de l’Industrie ainsi que la ministre déléguée chargée des MRE. Aux côtés du président de la CGEM, ils ont répondu à toutes les questions relatives à la problématique de l’investissement des Marocains du monde dans leur pays d’origine, des opportunités que présente le Maroc et de la manière de les accompagner et de les impliquer dans l’effort de relance économique du pays.

Plus d’un millier de Marocains du monde de plus de 40 pays ont participé à cette rencontre organisée par la 13ème région de la CGEM dédiée aux Marocains de l’étranger et modérée par Karim Amor, le monsieur diaspora du patronat.

Des stars comme Richard Attias, Michael Zaoui ou le chercheur Rachid El Yazami ainsi que des startuppers, des patrons de TPE et de PME en Europe, aux Etats-Unis ou en Asie ont été présents à distance. Ils voulaient tous savoir comment ils pouvaient participer à l’effort de relance économique post-Covid-19. Et s’informer sur ce qu’offre le Maroc en termes d’opportunités d’investissement, d’accompagnement, de programmes et d’outils spécifiques qui peuvent les aider à passer à l’acte d'investir.

Chakib Alj, Moulay Hafid Elalamy, Mohamed Benchaâboun et Nezha El Ouafi ont dressé d'abord un panorama des défis et des opportunités qui attendent le Maroc. Avant de présenter tous les mécanismes et outils que met l’Etat à la disposition des investisseurs de toutes origines, ainsi que des mécanismes destinés aussi bien aux Marocains de l’intérieur qu’à ceux de l’étranger.

70% des investissements des MRE vont vers la pierre

Cette crise a montré, comme l’ont souligné aussi bien Chakib Alj, le président de la CGEM, que Mohamed Benchaâboun, le lien fort qui lie les MDM à leur pays. Un indicateur le montre bien, celui des transferts d’argent qui ont connu une progression inattendue de plus de 5% en 2020, quand tout le monde s’attendait à une baisse de ces flux du fait de la crise qui a frappé le monde entier.

Mais au-delà de ce constat de forte solidarité que montre cette tendance, le ministre des Finances est allé dans les détails pour décortiquer ce chiffre des 68 milliards de dirhams reçus en 2020, pour en tirer des leçons sur l’acte d’investir des MDM.

« Ce montant important reflète la solidité des liens entre la communauté des MDM et leurs pays. Mais nous avons besoin de dévisser ce montant pour savoir la destination de ces transferts », note l’argentier du royaume qui connaît bien ce sujet du fait de son ancien poste de patron du groupe Banque Populaire, première banque des MRE.

Selon le ministre, 15% de ces transferts sont dirigés vers l’épargne et viennent renforcer les dépôts bancaires. L’épargne des MRE représente, selon lui, 20% de l’épargne globale gérée par les banques.  

La plus grosse part (75%) va à la solidarité familiale. Tandis que seuls 10% de ces transferts sont orientés vers l’investissement, confie le ministre des Finances. Et dans ces 10%, une part de 70% va dans le foncier ou l’immobilier.

Sur les 68 milliards de transferts des MRE, seuls 7 ou 8 milliards vont donc à l‘investissement, dont 5 milliards sont concentrés sur la pierre, révèle le ministre des Finances.

« Il faut qu’on sache donc pourquoi le Maroc ne tire pas profit de l’investissement, du savoir-faire de cette communauté, de son réseau sur lequel le Maroc peut capitaliser pour la relance et pour son développement économique. Surtout que ces chiffres ne bougent pas beaucoup dans le temps, malgré les efforts du Maroc dans l’encouragement de l’acte d’investir », signale M. Benchaâboun.

Le ministre cite ainsi la montée du Maroc dans le classement Doing Business, les efforts menés dans la simplification des procédures administratives, la réforme des CRI, les mécanismes de subvention et d’appui à l’investissement, ainsi que le fonds dédié aux MRE, MDM Invest. Un fonds, note le ministre, qui n’a pas connu beaucoup de succès, mais qui sera totalement revisité, annonce le ministre.

« Ce fonds participe à hauteur de 10% à l’investissement sous forme de subventions, mais les conditions d’accès étaient difficiles. Il y avait également des insuffisances dans la communication autour de ce fonds créé il y a une dizaine d’années. Ce que je veux annoncer aujourd’hui, c‘est que MDM Invest sera revu pour qu’il devienne un véritable outil d’encouragement de l’investissement des MDM. On le fera dans le cadre d’une démarche concertée avec tous les acteurs concernés », a annoncé le ministre des Finances.

Objectif : attirer 500.000 investisseurs de la diaspora d’ici 2030

Et MDM Invest n’est qu’un instrument parmi d’autres qui permettront de mobiliser les MRE et les compétences marocaines à l’étranger. La ministre déléguée chargée des MRE, Nezha El Ouafi, ayant annoncé toute une stratégie lancée par son département pour la mobilisation des compétences marocaines à l’étranger. Avec un objectif chiffré : attirer 500 000 investisseurs de la diaspora d’ici 2030.

Un objectif ambitieux qui passera selon elle par plusieurs réformes qui sont déjà entreprises (simplification des procédures administratives, réforme des CRI, digitalisation…), mais aussi par la création de canaux directs entre les MDM et les institutions concernées, publiques et privées et par une nouvelle approche de la diplomatie économique.

« Nous ne voulons plus que les MDM aient pour seul interlocuteur le ministère délégué chargé des MRE. Mais qu’ils soient en contact direct avec les différents acteurs du terrain. Nous avons mené une première expérience avec l’OFPPT, où 5 000 MDM collaborent aujourd’hui de manière directe pour former les formateurs dans les domaines de la technologie, du numérique ou de l’industrie… Nous allons faire de même avec l’IRESEN pour mettre cette institution en contact direct avec des Marocains à l’étranger qui s’intéressent au développement vert. Et cela sera également fait avec les CRI et tous les départements ministériels. C’est une stratégie où tous les départements ministériels sont impliqués », explique-t-elle.

La ministre déléguée précise aussi que la réforme des ambassades et des consulats à l’étranger, où un grand chantier de dématérialisation des procédures est en cours, permettra de libérer les ressources humaines de la diplomatie marocaine dans toutes les villes du monde où elles sont présentes. Le but étant de consacrer plus de temps et d’énergie à la diplomatie économique, à accueillir les porteurs de projets, les informer, les mettre en contact avec les administrations et les acteurs privés au Maroc, et les accompagner dans leurs démarche d’investir.

Nezha El Ouafi compte également beaucoup sur la CGEM, avec laquelle elle travaille de manière étroite, pour réussir cette opération de mobilisation des compétences marocaines à l’étranger.

Avec sa 13ème région dédiée exclusivement aux Marocains du monde, le patronat a enclenché également une série d’initiatives pour être un fédérateur de ces énergies.  

« La mobilisation de la diaspora marocaine, spécifiquement les compétences marocaines où qu’elles soient, est importante pour le développement économique de notre pays et pour réussir ensemble ce tournant historique qu’est la relance post-Covid-19 », souligne Chakib Alj, le président du patronat.

« Pour les accompagner de façon concrète et leur donner un maximum de visibilité, la CGEM mettra à leur disposition toute son organisation matricielle. A savoir, 13 CGEM régions, 37 fédérations sectorielles, 17 commissions thématiques et un groupe parlementaire à la chambre des conseillers qui défend des lois et des amendements que notre organisation étudie toute l’année et propose au gouvernement et au Parlement », poursuit le patron des patrons, avant d’annoncer que la CGEM créera dans les prochains jours un « corridor d’accompagnement à l’investissement » dédié exclusivement aux MRE.

Un corridor qui sera géré par Karim Amor, président de la 13ème région de la CGEM, et qui aura pour objectifs, comme le déclare Chakib Alj à l’adresse des MDM, « de vous mettre en relation avec les professionnels de votre secteur, de vous aider à vous familiariser avec les textes et règlements et de vous mettre en relation directe avec les interlocuteurs idoines des ministères pour la présentation, le financement de vos projets et la concrétisation de vos projets ». 

Être aussi compétitif que l’Inde : le challenge lancé par MHE

Et les domaines et secteurs où les MDM peuvent investir, ce n’est pas ce qui manque selon le ministre de l’Industrie Moulay Hafid Elalamy qui a d’emblée affiché son optimisme et sa surprise de voir comment différentes compétences marocaines, au Maroc comme à l’étranger, se sont soudées et ont collaboré durant cette crise pour innover et aider le pays à faire face à la crise. Une énergie, « un capital immatériel phénoménal », que le ministre dit ne pas vouloir lâcher et entend capitaliser dessus pour la réalisation de sa stratégie de relance dans l’industrie, dont il a exposé les grands axes aux MDM.

Une présentation qui est allée à l’essentiel : les objectifs du Maroc et le rôle que peuvent jouer les MDM dans la réalisation de ces objectifs.

Le premier, selon le ministre de l’Industrie est d’améliorer le taux d’intégration industrielle. Le second est de faire monter le pays en compétitivité. « C’est bien joli de fabriquer des choses chez soi, mais si on n’est pas compétitif, on perd notre temps », lance-t-il. Troisième objectif : la décarbonisation de la production nationale qui « sera déterminante dans les échanges avec l’Europe qui veut mettre en place une taxe carbone sur ses importations ».

Des objectifs qui sont selon MHE à la portée du Maroc. Il donne ainsi un exemple concret : 

« Dans l’automobile, nous avons découvert que le Maroc a été classé en termes de compétitivité derrière la Chine et l’Inde. Ce sont les deux seuls pays plus compétitifs que le Maroc. L’inde fait 92% de taux d’intégration. Le challenge au Maroc, c’est de nous mettre au même niveau que l’inde en termes de compétitivité. Et c’est possible », dit-il.

« Durant cette crise, il y avait un engouement pour la production nationale, une capacité à travailler ensemble… Je n’ai jamais vu l’économie marocaine se serrer les coudes qu’en cette période. Nous allons travailler beaucoup avec notre diaspora pour réussir ces challenges », souligne-t-il.

A côté de ces challenges, le ministre a montré ce qu’offre le Maroc aux investisseurs qu’ils soient nationaux, MDM ou étrangers.

« Il n’y a pas que de la place pour les groupes internationaux. La charte d’investissement du Maroc est ouverte pour tout le monde, Marocains, MDM et étrangers… Nous n’avons qu’une seule charte de l’investissement valable pour tout le monde », lance-t-il.

Donc tous les avantages accordés aux étrangers peuvent également bénéficier aux investisseurs marocains et aux MDM. Mais pour aller plus dans le concret, MHE énumère tous les avantages qu’offre le Maroc au-delà du soutien ou de l’accompagnement de l’Etat.

« Je vais partager avec vous ce que je reçois des investisseurs comme remarques. La première appréciation qui remonte, c’est la qualité de nos RH. Je vous donne un exemple concret : lors de l’inauguration de l’usine de pales éoliennes de Siemens, le président de la compagnie m’a annoncé qu’il comptait d’ores et déjà doubler la capacité de l’usine. Et il m’a expliqué pourquoi. Avant de lancer leur usine au Maroc qui coïncidait avec le lancement d’une autre usine en Grande-Bretagne, Siemens a envoyé 500 ingénieurs marocains à l’étranger pour une formation de trois mois. Ces ingénieurs sont revenus et c’est eux qui ont monté l’usine de Tanger. Mais celle de Grande-Bretagne n’arrivait pas à démarrer. La compagnie a donc décidé d’envoyer 50 ingénieurs marocains à la rescousse, et c’est eux qui ont pu débloquer la situation. C’est en remarquant cela que le président et le conseil d’administration de Siemens ont décidé de doubler la capacité de leur usine marocaine », raconte MHE.

Il donne également l’exemple de PSA à Kénitra et de la Citroën électrique AMI qui a été fabriquée entièrement par des ingénieurs et des techniciens marocains.

Autre avantage que présente le ministre aux futurs investisseurs MDM : la capacité d’exporter sans droits de douane à partir du pays vers 56 destinations, dont les Etats-Unis, l’Europe et tous les autres pays avec qui le Maroc a signé des accords de libre-échange. 

« Le Maroc ouvre un marché important pour les investisseurs. Et la proximité de l’Europe nous donne aujourd’hui une compétitivité encore plus forte avec cette crise qui a créé une tectonique des plaques dans les chaînes mondiales de valeur. Les européens ont compris que l’Asie pose problème en termes de proximité, d’agilité… Le Maroc a ses chances dans cette reconfiguration ».

Autre facteur : l’ouverture sur l’Afrique, un marché d’un milliard d’habitants, un continent d’avenir. « Les portes vers l’Afrique sont ouvertes. Beaucoup de groupes internationaux ont compris que nous sommes une des portes vers l’Afrique et ont installé leur plateforme de production ou leur siège au Maroc pour cibler le continent », ajoute le ministre.

La banque de projets d’import-substitution est ouverte aux MDM

Autre objectif que MHE cible et où il tient à associer les MRE : sa politique d’import-substitution.

Le Maroc importe près de 183 milliards de produits finis de consommation tous les ans. Avec cette crise, le ministre de l’Industrie a compris l’intérêt de la production nationale et a lancé une banque de projets pour couvrir une partie de ces importations. Deux banques de projets (200 au total) ont ainsi été lancées pour couvrir dans une première partie quelque 34 milliards de dirhams d’importations. Mais aussi d’atteindre, comme le souligne le ministre, un minimum de 17 milliards de dirhams d’exportations à travers ces projets.

MHE annonce ainsi que ces deux banques de projets sont ouvertes aux MDM qui sont intéressés par des investissements dans les 13 secteurs couverts par cette stratégie. Une stratégie qui a eu beaucoup de succès selon les chiffres qu’il a présenté.

« En termes de substitution, nous sommes à une enveloppe de 20,6 milliards de dirhams. Ce sont des projets engagés, dont certains sont déjà opérationnels et qui vont atteindre les 14 milliards à l’export. Et nous venons à peine de démarrer. Cette tranche de 34 milliards de dirhams sera absorbée dans les prochaines semaines, et nous allons nous attaquer à des tranches additionnelles », a confié le ministre.

Mais pour cela, il faut que les MDM mettent la main à la poche comme l’a dit clairement et sans détours le célèbre lobbyiste marocain et organisateur d’évènements mondiaux Richard Attias.

Pour lui, le Maroc a besoin aujourd’hui de diversifier son économie. Et dans le court terme. « On n’a pas de temps. Le changement, c’est maintenant. Il y a un tas de domaines où le Maroc peut devenir un champion mondial, comme les technologies, l’industrie de la santé, les énergies renouvelables… La diaspora veut contribuer. Nous devons, nous les MDM, avoir de la générosité, la volonté de mettre à contribution notre réseau sans aucun affairisme. Mais il faut aussi qu’on mette la main à la poche, L'Etat doit trouver des mécanismes où les MDM vont mettre de l’argent pour investir dans le produit Maroc », lance M. Attias.

Une demande qui n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd, surtout quand le concerné est un ancien banquier. Puisque le ministre des Finances lui a présenté deux mécanismes qui permettent à la diaspora d’y mettre son argent, d’investir dans des secteurs stratégiques et d’avenir.

« Il existe aujourd’hui des outils forts sur le plan financier pour faire en sorte que les MDM puissent accompagner la relance économique de façon directe et indirecte », signale le ministre des Finances en réaction à l’intervention de Richard Attias.

Premier mécanisme : le Fonds Mohammed VI pour l’investissement, qui est, selon M. Benchaâboun, ouvert à tout le monde, y compris les MRE. « C’est un produit spécifique qui va permettre aux MDM de participer aux fonds thématiques, notamment dans la santé ou la biotech, les infrastructures, les technologies ou la restructuration industrielle », souligne le ministre des Finances.

Autre véhicule : l’emprunt national qui sera lancé cette année par le Maroc. Un emprunt qui sera exclusivement réservé, selon Benchaâboun, aux personnes physiques marocaines, résidentes ou non. Et qui sera une occasion pour les MDM de financer, de manière indirecte, les efforts de relance de l’Etat. 

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