Modèle de développement: le volet économique décortiqué par 6 personnalités du monde des affaires

Le Nouveau Modèle de Développement (NMD) n'a pas fini de susciter le débat. Pour challenger sa composante économique, Médias24 a rassemblé un panel d'éminentes personnalités du monde des affaires face à trois membres de la commission, dans un débat sans ambages.

Modèle de développement: le volet économique décortiqué par 6 personnalités du monde des affaires

Le 3 juin 2021 à 21h18

Modifié 4 juin 2021 à 12h35

Le Nouveau Modèle de Développement (NMD) n'a pas fini de susciter le débat. Pour challenger sa composante économique, Médias24 a rassemblé un panel d'éminentes personnalités du monde des affaires face à trois membres de la commission, dans un débat sans ambages.

D'un côté Ahmed Reda Chami, Ghita Lahlou et Youssef Saâdani, tous les trois membres de la Commission Spéciale du Modèle de Développement (CSMD).

De l’autre côté Adil Douiri, Mohamed Hdid, M'fadel El Halaissi, Abdou Diop, Hassan Benabderrazik et Mehdi Alaoui, d'éminents représentants du monde économique et du milieu des affaires. Ils sont économistes, hommes d'affaires, managers, consultants, fiscalistes,...

L'échange qui a duré plus de 2 h 30 a porté sur la seule composante économique du rapport sur le nouveau modèle de développement (NMD).

Plusieurs questions fondamentales et importantes pour le développement économique du pays, duquel dépend le financement du nouveau modèle de développement ont été soulevés.

Nous restituons ici une infime partie de cet échange. Nous reviendrons sur les différentes interventions en détail dans de prochains articles.

6% de croissance pendant une décennie

Quelques rappels sur les grandes lignes des propositions de la CSMD:

Le NMD (Nouveau modèle de développement) vise l’accélération de la croissance pour atteindre un rythme moyen annuel de 6%. L’accession à ce nouveau palier permettra de doubler le PIB par habitant à l’horizon 2035.

Pour ce faire, la commission estime que quatre processus fondamentaux doivent être encouragés, pour renforcer la sophistication de la production nationale et faire converger le Maroc vers la structure des économies les plus avancées :

- la modernisation du tissu économique existant afin qu’il soit plus formalisé, concurrentiel et productif;

- la diversification pour introduire de nouvelles activités et de nouveaux savoir-faires;

- la montée en gamme pour augmenter la valeur ajoutée locale;

- l’internationalisation pour orienter les entreprises vers l’export.

Pour ce faire, cinq choix stratégiques doivent être actionnés :

- Sécuriser l’initiative entrepreneuriale.

- Orienter les acteurs économiques vers les activités productives.

- Réaliser un choc de compétitivité.

- Un cadre macroéconomique au service du développement.

- Faire émerger l’économie sociale comme pilier de développement.

Le déploiement du NMD, un enjeu fondamental

Un des sujets phares de cet échange a été la question de la gouvernance.

"Le choix de la démocratie dans notre pays est irréversible. La démocratie avance, mais elle a des conséquences. L’une de ses conséquences c’est qu’elle porte au pouvoir exécutif, chargé de l’exécution du modèle de développement, des professionnels de la politique qui n’ont reçu ni la formation ni l’expérience pour mettre en œuvre des politiques de développement dans un monde concurrentiel, sophistiqué et mouvant", fait remarquer Adil Douiri.

"La complexité des problèmes transverses dans les ministères est quotidienne. Il faut des arbitres ou des macro-arbitres concernés par des macro-sujets… Et aucun process écrit ne peut résoudre ce problème", ajoute-t-il.

Abdou Diop a également soulevé ce point: "Il faut voir par quel mécanisme ce travail va être un des socles du travail du gouvernement, car la mise en œuvre est quand même du ressort du gouvernement".

De son côté, Hassan Benabderrazik a également exprimé son intérêt de savoir comment mettre en œuvre tout cela.  "Ce qui est important c'est de savoir comment changer les choses". "La grande difficulté que l'on a c'est n'est pas de fixer des objectifs ambitieux, c'est comment concrètement sur le terrain on arrive à faire bouger les choses. C'est très difficile et réellement compliqué", avance-t-il.

"Une des choses qui mériterait d'être développé davantage c'est la partie relative à la réforme du fonctionnement de l'Etat", ajoute-t-il. "Tout ce que vous (la CSMD, ndlr) avez développé est une démarche de complémentarité et de partenariat entre le public et le privé mais chacun dans son rôle. Pour cela, il est important de réfléchir à quel type de fonctionnement de l'administration nous désirons et comment on le met en œuvre", précise-t-il.

Ne pas stigmatiser le succès et la création de richesse

Pour sa part, Mohammed Hdid s'est attardé sur le rôle des grands groupes. "Les grands groupes méritent d'être évoqués davantage dans ce rapport", avance-t-il.

"Les grands groupes qui sont la locomotive qui vont créer de la croissance, de l'épargne, qui vont intervenir sur le marché des capitaux ... c'est un point qui mérite d'être davantage exprimé. Ce n'est pas un pêché de gagner de l'argent. Il faut l'exprimer dans un rapport comme celui sur le nouveau modèle de développement", avance-t-il.

"il faut lutter contre la rente mais il faut récompenser les efforts qui aboutissent à la création d'emplois, de richesse. Il ne faut pas stigmatiser le succès qui à mon sens peut être une incitation dans le cadre de ce nouvel élan économique".

Sur la fiscalité, domaine d'expertise de Mohammed Hdid, il explique qu'il "y a des mécanismes innovants pour accompagner ces locomotives pour qu'elles ne s'essoufflent pas, au niveau de la création de la richesse".

"Il faut avoir de l'audace"

Dans son intervention, M'fadel El Halaissi a soulevé une question fondamentale qui est celle de l'audace. "Je crois personnellement qu'une société est menée par des élites. Ces élites doivent avoir de l'audace. Si on veut chercher des consensus, on peut y laisser des plumes", avance-t-il.

Cette audace dans les réformes structurelles, M'fadel El Halaissi l'explique par  le secteur du tourisme qu'il prend pour exemple. "On veut développer le secteur touristique et des loisirs. On ne peut pas le faire si nous continuons à avoir une loi sur les boissons alcoolisées complètement discordante".

"On est dans un zone grise, c'est toléré, pas toléré... ce n'est pas bien. Il faut être clair et dire les choses. On veut développer le tourisme, on ne peut pas le faire sans boîtes de nuit, sans licences de boissons,...  donc soit on y va soit on n'y va pas". Il s'agit évidemment d'un exemple.

La dimension africaine, parent pauvre du NMD ?

Abdou Diop, "Monsieur Afrique", comme beaucoup le surnomment, n'a pas manqué de soulever la question de la dimension africaine dans le rapport du NMD.

"Je pense que dans le rapport, on  a été très timide dans la dimension africaine du Maroc. Il y a eu une sorte d’hésitation", avance-t-il.

"L’ancrage africain du Maroc n’apparaît pas dans le rapport, alors qu'il est important qu’il soit affirmé et à trois niveaux. D'abord à un niveau sociétal : le Maroc n’est plus une terre de transit, c’est une terre d’émigration. Dans le nouveau modèle, il faut intégrer cette donne".

"Il y a le niveau stratégique. La stratégie Afrique doit être lisible et claire, elle mérite un axe à elle seule, car elle est transverse sur toutes les dynamiques. On rentre sur une zone de libre échange continentale. Le Maroc a renforcé sa position sur le continent".

"Enfin il y a un niveau sectoriel : quand on parle du tourisme par exemple, on parle toujours des marchés émetteurs. Pour moi, il est clair que le salut du tourisme post-Covid, passe par le tourisme intra-africain. Un nigérien dépense au Maroc trois fois plus qu’un français ou qu’un espagnol. Et cette dimension là n’est pas présente", reproche-t-il.

Nous y reviendrons en détail.

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